de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 3 novembre 2012

65- Faites ce qu'ils disent, mais...



Si vous voulez comprendre le message qui vient, il vous faut regarder cette vidéo d'une minute. Et si vous n'avez pas cette minute, alors regardez au moins les 3 premières secondes. Cette vidéo a été mise en ligne par le Vatican. La rencontre dont il est question était le 28 juin 2012.
 


Vous rappelez-vous les deux vieillards, Statler et Waldorf, qui commentaient toujours tout dans les Muppet Show ? Nous avions un peu ça dans la paroisse avec certaines dames qui se plaçaient dans le fond de l'église. Leur commentaire le plus décapant a été pour monseigneur Emmanuel, lorsqu'il est venu pour le départ du père Athanase. Alors que tout le monde était heureux de cette fête et de pouvoir rendre hommage au travail accompli, l'évêque n'a pas esquissé le moindre sourire et semblait livide. Si bien que l'une d'elles a dit : Tu as vu la tête qu'il fait ? Ce à quoi l'autre a répondu : Oui, si on lui coupe la tête, il n'y aura pas de sang !



J'aime beaucoup cet humour décalé, surtout quand on connaît la respectabilité des dames en question.
 
Même mon frère, lorsqu'il a écrit à l'évêque avec indignation pour prendre la défense d'Evangelia T., est revenu sur la froideur qui le caractérise.

Ceci dit, tous ceux qui voient la vidéo présentée plus haut sont heureux de voir enfin le métropolite Emmanuel Adamakis épanoui. Il devrait aller à Rome plus souvent...


Revenons à des considérations plus sérieuses. L'une des différences ecclésiologiques entre les catholiques et les orthodoxes est la suivante : pour être membre de l’Église catholique romaine, il faut reconnaître l'autorité du pape. Pas de reconnaissance de l'autorité du pape = pas d'appartenance possible à l’Église catholique. Nous le voyons encore aujourd'hui avec le conflit qui oppose le Vatican aux autorités chinoises (Gianluigi Nuzzi, Sa Sainteté, éd. Privé, 2012, p. 268-275) Pour les orthodoxes, sont membres de l'Église ceux qui professent la même foi. Ainsi, il n'y a pas d'autorité supérieure. Chaque évêque local représente la plénitude de l’Église par les sacrements qu'il dispense. Et c'est l'unité de la foi des différentes églises locales qui fait l’Église universelle.

C'est parce qu'ils ne reconnaissent pas la légitimité de l'ecclésiologie vaticane, Église avec laquelle ils ne sont pas en communion, que les membres du clergé orthodoxe n'embrassent jamais la main des membres du clergé catholique. Tout comme, d'ailleurs, les membres du clergé catholique n'embrassent jamais la main des membres du clergé orthodoxe.

C'est ainsi que, lorsque le père Athanase a rencontré Jean-Paul II, il lui a chaleureusement serré la main, mais il ne l'a pas embrassée.



Que se serait-il passé si le père Athanase avait embrassé la main du pape ? Son évêque lui aurait fait remarquer que c'est à lui que revient cette marque de révérence, et non aux représentants des autres Églises. Et il aurait suspendu son prêtre.

Les journaux grecs des milieux orthodoxes traditionnels ont été scandalisés de voir que le métropolite Emmanuel ne respectait pas ces règles ecclésiologiques élémentaires et qu'il reconnaissait au pape de Rome une autorité sur lui. Cette marque de soumission a été reprise par la mafia ; elle est très bien décrite dans la trilogie Le Parrain.


 
Vous avez du mal à comprendre comment un orthodoxe voit l'image ci-dessus ? Remplacez le pape par Don Corleone et ce sera plus facile.

Dans le message sur Paolo Gabriele, majordome du pape, j'ai repris les informations montrant que les évêques allemands, et donc également le pape, sont propriétaires de la maison d'édition Weltbild, qui génère deux milliards d'euros de chiffre d'affaire annuel, notamment par la publication de 2500 revues pornos et ésotériques différentes (Gianluigi Nuzzi, Sa Sainteté, éd. Privé, 2012, p. 242-248). Cela me met vraiment mal à l'aise que mon évêque embrasse la main du propriétaire du plus grand réseau d'édition de revues pornos de tous les temps.

Rien n'obligeait le métropolite Emmanuel à se soumettre. Un autre évêque de la même délégation s'est, lui, montré très digne en faisant comme le père Athanase, et comme tous les orthodoxes avant lui : une respectueuse poignée de main protocolaire.



Depuis les origines du christianisme, il est d'usage d'embrasser la main d'un prêtre. C'est une forme de respect de la Grâce divine qui passe par ces mains lors de la célébration des sacrements. Pour montrer que ce n'est pas la personne indigne du prêtre qui est honorée par le baisemain, mais bien la Grâce dont il n'est que l'instrument, certains prêtres recouvrent leur main de leur rason liturgique quand on les embrasse. Le père Igor, de la paroisse russe hors frontières de Lyon, le faisait systématiquement. D'autres prêtres retirent leur main quand on veut la leur embrasser pour signifier qu'ils s'estiment indignes de la Grâce qui les habite. C'est très fréquent chez les moines-prêtres, dans les monastères. D'autres encore tendent un crucifix pour montrer que c'est Dieu seul que l'on vénère et qu'il ne doit pas y avoir de confusion.

Quelles que soient les habitudes des membres du clergé face au baisemain, jamais on n'embrasse la main d'un catholique : les catholiques ne donnent pas à ce geste la même signification, comme je l'ai dit plus haut, et les Églises ne reconnaissent pas les sacrements des autres. C'est parce que les sacrements ne sont pas reconnus que le père Placide Deseille, ancien moine trappiste et très bon théologien, a été rebaptisé lorsqu'il est devenu orthodoxe. Et si monseigneur Emmanuel estime que la Grâce divine n'est présente que dans l'orthodoxie, qu'est-ce qu'il a embrassé sur la main du pape ?

Était-ce le respect dû à la fulgurance de son discernement ? Jimmy Salive, qui défraye à titre posthume la chronique judiciaire Outre-Manche par l'accusation de 300 agressions sexuelles sur des mineurs, a reçu des mains du pape une décoration pontificale pour ses bonnes œuvres en 1990. De quel discernement inspiré peut-il donc être fait mention chez le pape ?

Dans cette série de messages, nous allons aborder les procédures qui se dessinent à la communauté hellénique de Lyon. L'une de ces procédures vise l'exclusion des élus qui ont dénoncé des irrégularités commises. Le métropolite Emmanuel, lorsqu'il a validé l'exclusion de deux de ces élus, a évoqué le fait que notre association a pour but l'exercice du culte orthodoxe grec. En quoi faire acte de soumission au pape de Rome est-il l'expression du culte orthodoxe grec ? Encore un à qui s'applique cette parole : Faites ce qu'ils disent, mais ne faites pas ce qu'ils font (Matth. 23, 3) !

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