de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 25 juillet 2015

176- Orthodoxie et catholicisme partie 2



Un dogme est une affirmation considérée comme fondamentale, incontestable et intangible par une autorité politique, philosophique ou religieuse.

Dans l’Église orthodoxe, il n'existe que trois dogmes :
  1. Dieu est Un en Trois Personnes, Père, Fils et Saint-Esprit ;
  2. Le Christ, Fils de Dieu, est pleinement Homme et pleinement Dieu ;
  3. Marie, Mère de Dieu, est toujours vierge.
Nous avons vu dans le précédent message que l’Église catholique a dogmatisé des idées qui relèvent de sa souveraineté, ou de l'application de sa politique, mais pas de sa foi. Le dogme de l'infaillibilité du pape  n'étant que l'un d'eux.

Mais il n'est pas besoin d'être un grand théologien pour considérer que le fait, en somme, de placer sur un même plan l'infaillibilité du pape et la divinité du Christ pose problème. En posant ce dogme, la papauté n'a fait qu'imiter l’Égypte antique, qui divinisait ses pharaons. Une méthode efficace pour asseoir un pouvoir sur une population donnée, mais une méthode qui vient du paganisme et non du christianisme.

Les orthodoxes considèrent que ce qui a été cru partout, par tous et en tout temps est la marque de l'Esprit-Saint qui guide l’Église. C'est pour cela que les décisions qui touchent l’Église ne peuvent être prises qu'à l'unanimité de l'ensemble des Églises du monde. C'est dans ce sens qu'est préparé le prochain concile panorthodoxe. L’Église pourrait donc ainsi, d'une certaine façon, être considérée comme infaillible, bien qu'il ne s'agisse pas d'un dogme, mais d'une conception spirituelle.

En juin 2010, Benoît XVI demandait pardon pour les fautes de l’Église. Ce faisant, il considérait que l’Église, guidée par l'Esprit-Saint et le Christ (Matth. 28, 20 ; Jn 15, 26), pouvait être faillible, tout en revendiquant que lui-même ne l'était pas. Il se plaçait ainsi au-dessus de l’Église. Il induisait ainsi que l'Esprit le guidait lui, mais ne guidait pas toujours l’Église...

Si certains dogmes relèvent ainsi de la politique, d'autres relèvent de la croyance, comme le Filioque, adjonction au dogme de la Trinité, ou l'Immaculée conception. Si le Filioque est un dogme ancien et puise sa source dans les écrits de saint Augustin, l'Immaculée conception ne date que du 8 décembre 1854. Tous ces ajouts, dont certains sont plus que douteux, ne font que dresser des barrières entre les hommes, sans les rapprocher de la Vérité.
Venant expliciter les dogmes, la doctrine de l’Église est définie par les conciles, qu'ils soient œcuméniques ou non. Elle s'inspire souvent des écrits des Pères de l’Église et évolue dans son application pour prendre en compte les changements de la société. Nous avons vu que le concile de Moscou avait fixé la doctrine sociale de l’Église russe à la fin de l'ère communiste. La doctrine est fixée suivant les préceptes de l’Évangile, mais également, bien souvent, par l'enseignement des spirituels qui la nourrissent de leur expérience, ainsi que par la culture des pays. Dans l’Église catholique, la doctrine est généralement fixée par le pape, au travers de ses encycliques, sortes de décrets d'application.

L'une des divergences entre l'Orient et l'Occident vient de ce rapport à l'héritage des Pères. En Orient, nombreux sont les penseurs sur lesquels s’appuient la doctrine de l’Église, ce qui permet de compléter, d'approfondir, ou d'enrichir la pensée de tel ou tel Père par celle d'un autre.

Ces Pères ne sont pas cantonnés à une région, même si la Cappadoce en a vu naître de nombreux. Ils ne sont pas davantage limités à une époque, qui aurait pris fin il y a fort longtemps. Basile le Grand, Grégoire le Théologien et Jean Chrysostome, communément appelés les trois saint Hiérarques, sont des Pères cappadociens du IVème siècle, mais Grégoire PalamasMaxime le ConfesseurIsaac le Syrien et bien d'autres parsèment l'histoire de l'orthodoxie.

En Occident, la théologie d'Augustin d'Hippone sert de fondement pour la doctrine catholique. L'œuvre de saint augustin est certes colossale, mais l'Occident s'est enfermé en faisant abstraction de tout ce qui venait à son encontre. Le Filioque, par exemple, trouve ses origines dans les écrits d'Augustin, et jamais la papauté n'accepta de prendre en compte la pensée orientale lorsqu'elle décida d'ériger cette réflexion métaphysique en dogme.


On pourrait évoquer de très nombreux autres points de divergence entre les catholiques et les orthodoxes. Citons-en quelques-un à titre d'exemple.

Au point de vue ecclésiologique :
  1. il faut deux évêques pour en ordonner un troisième (O), alors qu'aucun évêque ne peut exercer sans la désignation du pape (C) ;
  2. le peuple valide l'élection d'un clerc et peut s'y opposer (O), mais n'a pas son mot à dire chez les catholiques. Je ne parle ici que de la théorie, et reviendrai sur le cas du métropolite Emmanuel Adamakis et le Daru-gate une autre fois ;
  3. les règles - dont beaucoup sont reprises dans la doctrine de l’Église - servent à guider les hommes, mais les pères spirituels ont une grande liberté pour les adapter à l'évolution spirituelle de chacun (O), alors qu'elles s'imposent aux croyants (C) ;
  4. du point précédent découle une approche divergente sur les cas de divorce et de nombreuses questions de société.

Au plan liturgique, on peut relever :
  1. le baptême par immersion (O), ou le baptême par aspersion (C) ;
  2. un prêtre ne peut pas célébrer d'office s'il n'y a pas au moins un fidèle orthodoxe avec lui (O) ; alors qu'un prêtre catholique peut célébrer même s'il est seul ;
  3. la communion se fait sous les deux espèces (O), ou sous la seule forme du pain (C) ;
  4. le pain liturgique est fait avec du levain (O), ou il il est azyme, comme le pain des juifs (C) ;
  5. la transsubstantiation se fait au moment de l'élévation (O), ou au moment de la prononciation des paroles du Christ (C) ;
  6. le prêtre prie face à l'autel et face à Dieu (O), ou face à au peuple depuis Vatican II (C) ;
  7. que le Christ te pardonne est la formule utilisée pour l'absolution (O), plutôt que je vous pardonne tous vos péchés (C) ;
  8. le baptême, la confirmation et la première communion sont liés et possibles dès la naissance (O), ou seulement par étapes qui ponctuent la vie de l'enfant (C) ;
  9. un divorce est l'annulation du mariage (O), ou la nullité du mariage - le mariage est alors réputé n'avoir jamais existé, même s'il y a eu des enfants entre temps (C) ;
  10. les mariages ou les baptêmes sont des offices immuables (O), ils peuvent être composés à la demande par les laïcs (C) ;
  11. après la mort, le sort de l'âme est le mystère de Dieu dans l'attente du Jugement (O), alors qu'elle est condamnée à expier ses fautes dans le purgatoire, sorte de salle d'attente avant le jugement dernier (C).

Au plan culturel :
  1. les symboles ne sont jamais représentés sur les icônes (O), alors qu'ils gardent une place dans la peinture religieuse (C) ;
  2. place des icônes (O), ou des statues (C) ;
  3. port de la barbe chez les clercs (O), ou non (C), même si, sur ce point, le métropolite Emmanuel Adamakis a déjà commencé à prêcher l'union ;
  4. le signe de croix se fait de droite à gauche (O), ou de gauche à droite (C) ;
  5. absence d'instruments de musique dans les offices (O), ou possibilité de leur présence (C).

Je suis toujours très embêté lorsqu'on me demande quelles sont les différences entre les orthodoxes et les catholiques. Des hommes très savants ont écrit des livres entiers sur chacun de ces points de divergence, et sur bien d'autres encore.

La plupart des divergences énumérées ci-dessus restent néanmoins facilement surmontables, car pouvant légitimement cohabiter au sein d’Églises réunifiées, et n'étant pas dogmatisées. Aucun de mes enfants n'est pareil, et je commettrais une faute grave si je voulais les plaquer sur le même modèle que j'aurais fixé au préalable. Il est légitime que chaque homme ait ses particularités propres, et cela vaut aussi bien pour les groupes humains et les Églises.

Les véritables problèmes viennent de ce qui a été dogmatisé, ainsi que des flots de sang qui ont coulé à travers l'Histoire chaque fois que l'Occident a voulu écraser les autres nations non soumises et leur imposer sa façon de penser.


Quelles que soient les unions, évidemment souhaitables, entre des institutions qui s'affrontent depuis presque aussi longtemps qu'elles existent, et je dirais même quelle que soit la part de vérité qu'elles prêchent, n'oublions jamais que, en tant que chrétiens, ce n'est pas l'appartenance à l’Église qui fait notre valeur, mais le respect et l'application du message du Christ. Et, à ce propos, ses paroles furent sans appel. Le Christ dit en effet à la Samaritaine, considérée par les juifs de son époque comme une hérétique : Femme, crois-moi, l’heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs. Mais l’heure vient, et elle est déjà venue, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car ce sont là les adorateurs que le Père demande. Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l’adorent l’adorent en esprit et en vérité. (Jn 4, 21-24)

Laissons donc les égarés à leurs propres anathèmes et faisons attention à rester justes dans ce que nous faisons, en gardant à l'esprit que la recherche de la Vérité est le Chemin qui conduit à la Vie. C'est sur ce principe que nous pourrons réellement être unis, bien au-delà des catholiques et des orthodoxes, dans l'amour plus que dans les textes.

samedi 11 juillet 2015

175- Orthodoxie et catholicisme partie 1



Pour comprendre l'orthodoxie, comme le catholicisme d'ailleurs, il faut remonter aux origines du christianisme, et étudier l'Histoire et la culture. Il convient, seulement ensuite, de se pencher sur les divergences de foi, pour comprendre in fine ce qui nous oppose et ce qui nous unit.
 
Par les miracles qu'il a faits durant sa vie terrestre, et l'enseignement qu'il donnait, le Christ a été vu par de nombreux juifs comme le Messie qui devait venir libérer Israël. Mais quand les juifs ont compris que le Christ n'était pas là pour les libérer des Romains et ne parlait pas de royauté terrestre (Jn 18, 36), les juifs se sont divisés (Jn 6, 64-69), ce qui a abouti à la naissance d'une nouvelle religion : le christianisme.

Judas, l'un des douze apôtres, croyait en cette royauté terrestre, et espérait y participer. Sa désillusion n'en fut que plus grande.
 
Après sa résurrection, le Christ envoya ses disciples enseigner toutes les nations, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit (Matth. 28, 19). Puis, lors de la Pentecôte, le Saint-Esprit descendit sur tous les apôtres sous forme de langues de feu (Act. 2, 1-13). À aucun moment, le Christ, ou le Saint-Esprit, ne donnèrent de pouvoir particulier à un apôtre plutôt qu'à un autre.

Tous les apôtres partirent à travers le monde, suivant le chemin sur lequel l'Esprit-Saint les guidait. Parthes, Mèdes, Élamites, ceux qui habitent la Mésopotamie, la Judée, la Cappadoce, le Pont, l'Asie, la Phrygie, la Pamphylie, l'Égypte, le territoire de la Libye voisine de Cyrène, et ceux qui sont venus de Rome, Juifs et prosélytes, Crétois et Arabes, tous entendaient les merveilles de Dieu sans distinction de préséance.

Au cours des premiers siècles, les chrétiens sont souvent persécutés. Lyon a l'une des premières communautés chrétiennes. Pothin, son premier évêque, meurt durant les persécutions de Marc Aurèle, comme Blandine et beaucoup d'autres.

Pendant la période des persécutions, beaucoup d'interprétations diverses apparaissent au sujet du Christ. Irénée de Lyon, successeur de Pothin, est disciple de Polycarpe, lui-même disciple de saint Jean. Il lutte contre la confusion des idées qui commencent déjà à gangrener le christianisme. Il écrit des traités contre les hérésies et contre les gnostiques. Est-ce que le Christ est Dieu ? Est-il vraiment mort ? Est-il vraiment un homme ? S'il est le Fils de Dieu, a-t-il été créé ? etc. Il contribue à établir le canon des saintes écritures, liste des livres considérés comme sacrés et qui forment aujourd'hui le Nouveau Testament. Pour ce faire, il écarte systématiquement tous les écrits dont l'origine apostolique n'est pas attestée.

 
Lorsque Constantin devient empereur, il promulgue l'édit de Milan, en 313, par lequel chacun est autorisé à pratiquer sa foi comme il l'entend. Cela met fin aux persécutions. En 325, Constantin convoque le premier concile œcuménique pour régler les divergences entre les chrétiens, et éviter que ces divergences ne divisent l'empire. En 330, il transfert le siège de l'Empire de Rome à Constantinople. En 380, il fait du christianisme la religion officielle de l'Empire.

Petit à petit, le christianisme se développe, beaucoup dans le bassin méditerranéen, grâce aux voies de communication de l'Empire romain. Il se constitue en groupes rayonnant depuis les grandes villes : Jérusalem, Antioche, Alexandrie, Rome et Constantinople, à partir du moment où l'empereur Constantin y transfert le siège de l'Empire.
 
Empire romain sous Constantin
 
 
Plus tard, à la mort de l'empereur Théodose, en 395, l'empire est divisé en deux : l'Empire romain d'orient et l'Empire romain d'occident. Rome, qui n'a jamais accepté de ne plus être la capitale de l'Empire, va alors utiliser le christianisme pour tenter de retrouver sa grandeur passée et essayer de dominer l'Empire d'orient.

Elle va se servir de la religion comme moyen politique d’hégémonie revendiquée. Elle développera, par exemple, la théorie du pape Vicaire du Christ (représentant du Christ sur terre), titre revendiqué pour la première fois par le pape Innocent III, au XIIème siècle. Ou encore la théorie de l'infaillibilité du pape, définie comme dogme au premier concile œcuménique du Vatican, en 1870.

La France sera considérée, pendant des siècles, comme le bras armé de l’Église catholique.  C'est en France que seront levées les croisades. Les exemples seraient nombreux à développer. Je relèverai seulement que c'est pour bénéficier du soutien militaire des rois de France que les maronites libanais se sont rattachés à Rome en 1182. Ils resteront sous leur protection jusqu'à la création du Grand Liban, où ils prendront les rênes du pouvoir.

La famille Borgia, au cœur de la papauté durant des décennies, et tristement célèbre pour sa débauche, n'est que la face la plus visible de cette emprise du pouvoir sur la religion. Elle n'en est malheureusement pas l'unique exemple.

Ainsi, petit à petit, environ du Vème siècle jusqu'à très récemment, les papes façonnent et réécrivent l'histoire à leur convenance, rendant toujours plus compliquée, voire impossible, une union des chrétiens. En cela, le pape François donne l'impression de se démarquer de cette conduite et, s'il réussissait à ramener son Église à l'essence de ses valeurs, il pourrait poser les bases d'un rapprochement des chrétiens.


Ce qui fixe l'appartenance à l’Église orthodoxe est la profession de la même foi (symbole de la foi du premier concile œcuménique). Les différentes églises du monde sont unies par cette foi commune. Cette union fait que je peux aujourd'hui communier en Roumanie, en Grèce, en Russie ou en Syrie, sans distinction.

Par contre, pour faire partie de l’Église catholique, il faut reconnaître au préalable l'autorité du pape. Un évêque, ou un prêtre, qui croirait en Dieu suivant tout ce que prescrivent les canons de l’Église, mais ne reconnaîtrait pas l'autorité du pape, ne pourrait pas faire partie de l’Église catholique. Le rituel de consécration d'un évêque est sans équivoque sur ce point.
 
Bien évidemment, les Églises d'orient n'acceptent pas cette volonté de domination. Elles considèrent que l'interprétation déformée des paroles du Christ ne sert que d'alibi politique. Le 16 juillet 1054, la rupture entre l'Orient et l'Occident devient officielle avec la bulle d'excommunication déposée par le représentant du pape sur l'autel de Sainte-Sophie. Même s'il ne s'agit là que d'une anecdote dans une histoire qui commença bien plus tôt, et qui n'a pas encore pris fin. Les guerres vont alors se succéder, où des chrétiens se battront contre d'autres chrétiens. Le christianisme ne servant que de prétexte à la volonté de domination propre à deux mondes ayant chacun sa propre culture.
 
Le sac de Constantinople par les croisés, en 1204, est l'équivalent de ce que fait aujourd'hui l’État Islamique en Syrie et en Irak. Il va marquer les générations et encrer solidement la division des Églises. Il y aura beaucoup d'autres guerres, où l'Occident s'opposera à l'Orient. Durant la seconde guerre mondiale, l'évêque croate, monseigneur Stépinac, sera allié aux nazis et organisera la déportation des serbes orthodoxes.

Aujourd'hui encore - derrière la guerre en Ukraine, par exemple - se perpétue, secrètement, le même combat entre l'Orient et l'Occident, l'Ouest et l'Est, où la religion est utilisée par les uns et les autres, où les cultures s'affrontent, ou bien servent seulement de moyen de conditionnement. Parmi les nombreuses vidéos sur le conflit en Ukraine - et je recommande à ce propos les chroniques de Jacques Frère -  je revois un véhicule ukrainien au rétroviseur duquel pendait un chapelet catholique, alors qu'il allait attaquer les habitants orthodoxes du Dombass.

Les flots de sang qui ont coulé au cours de l'Histoire ont toujours été la véritable barrière séparant des mondes qui tentent d'avoir prédominance, l'un sur l'autre, plutôt que de vivre en harmonie.
  
Au fil des siècles, et surtout dans l'histoire récente, Rome a dogmatisé ses idées, afin de les rendre incontournables et d'asseoir ainsi son pouvoir politique, même si elles ne relevaient pas de l'essentiel de la foi. De même, les exemples ne manquent pas où Rome utilise la canonisation d'hommes corrompus pour sacraliser sa politique à travers eux. J'ai parlé plus haut du Cardinal Stépinac, mais bon nombre de papes ont été canonisés suivant ce principe, et bien d'autres saints également.
 
Les orthodoxes n'ont jamais décidé d'imposer de nouvelles règles, ou de nouvelles croyances, autres que celles des conciles qui unissaient le monde chrétien dans son ensemble à l'époque de l’Église indivise. On considère donc qu'ils sont restés les plus proches du christianisme des origines, même s'il ne faut pas regarder de trop près la conduite de certains prélats. Les catholiques, par leurs multiples évolutions, se sont éloignés de cet esprit des origines.

 
Aujourd'hui, les christianismes orthodoxe et catholique sont très proches sur le fond, car ils sont tous les deux fondés sur l’Évangile et partagent une histoire commune. À Lyon, par exemple, Saint Irénée, ou sainte Blandine, ne sont ni orthodoxes, ni catholiques, car ces termes n'existaient pas. Nous avons les bases d'une histoire et d'une foi commune.

L'unité des Églises est toujours possible, bien que les blessures de l'Histoire soient profondes. Mais, pour qu'elle se fasse, il faut revenir à ce qui nous unit, et non à ce qui nous divise, c'est à dire revenir à l'essence du christianisme, tout en condamnant fermement les dérives dont nous nous sommes rendus coupables. Mais, pour cela, il faut que les hommes qui sont à la tête des Églises acceptent l'idée qu'ils ont eu tort, même lorsqu'ils affirmaient qu'ils avaient raison. Or, pour l'instant, ils n'en sont pas capables. Sauf pour ce qui est du patriarcat de Moscou, qui a su se remettre en cause pour retrouver son unité avec les Hors-Frontières, comme nous l'avons vu dans le précédent message.

Empires romains d'Orient et d'Occident


Aujourd'hui, 1000 ans après le schisme, les catholiques et les orthodoxes restent donc toujours divisés, suivant a peu près les frontières des anciens Empires d'orient et d'occident, la Russie s'étant agrégée à la partie orientale, bien que souvent attirée par l'Occident, comme sous le règne de Catherine II ou de Gorbatchev.