de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 28 mai 2016

219- De la conscience du péché à la complicité



Le 5 avril 2016, monseigneur Lalanne, évêque catholique de Pontoise, intervenait dans le cadre de l'émission Le temps de le dire, consacrée à L'Église de France face à la pédophilie. Il se fit remarquer en déclarant sur RCF, réseau de 63 radios chrétiennes francophones : « La pédophilie est un mal. Est-ce que c'est de l'ordre du péché ? Ça, je ne saurais pas dire, c'est différent pour chaque personne. »

« La difficulté, c’est quelle conscience la personne a de ce mal ? Comment elle s’en sent responsable ? […] Quand on commet un péché, on a conscience qu’on blesse la relation à l’autre et qu’en blessant la relation à l’autre, on blesse la relation avec Dieu », explique-t-il.

Précisons que monseigneur Lalanne est l'évêque chargé de la veille contre la pédophilie... Les victimes ont raison d'affirmer que l’Église n'a jamais pris la mesure des crimes commis, ce qui explique pour partie qu'elle continue à couvrir les prêtres coupables.

L'évêque fut plus ou moins défendu par des collègues ecclésiastiques qui tentèrent de rattraper ce qu'il avait dit. D’un point de vue théologique, les affirmations de Mgr Lalanne peuvent s’expliquer. « On considère qu’il y a péché lorsqu’il y a un acte moral responsable », souligne le P. Laurent Lemoine, dominicain et théologien moraliste, auteur de plusieurs documents sur la pédophilie. « Or, parmi les personnes coupables de faits de pédophilie, beaucoup sont de grands pervers ». (source)

Ou encore : des propos tels que ceux de l’évêque de Pontoise, s’ils ne sont pas absolument faux d’un point de vue formel, « ne sont plus audibles », assure le P. Lemoine. (source)

Bien que ces défenseurs malhabiles se disent théologiens, leur argumentaire relève plus des sketches de Coluche que de la patristique. C'est en effet Coluche qui introduisit la notion de conscience pour caractériser une faute, lorsqu'il répliqua, à propos de l'histoire du viol de Monique : Monsieur le juge, un viol, c'est quand on veut pas. Moi, je voulais, moi ! 




En fait, Coluche n'est pas le seul maître à penser des hiérarques catholiques. Ces notions sont malheureusement répandues, comme il ressort du joli petit tableau ci-après, dont monseigneur Lalanne tire ses élucubrations.

Dimensions anthropologiques
Au niveau relationnel
Échec de la responsabilité
Pour vivre l’échec
Réussite dans la responsabilité
Pour vivre le succès
Psychologique
De soi à soi
Culpabilité
Humour
Estime de soi
Humilité
Morale
De soi aux autres et soi-même comme un autre
Faute (honte)
Peine, blâme, réparation
Éloge
Modestie
Spirituelle
De soi à Dieu
Péché
Pardon
Sainteté
Prière de louanges


On y lit que le péché se commet envers Dieu. Agresser un autre homme ne dépasse pas le stade de la simple faute.

Mais cette relation entre la conscience et le péché, si elle est répandue au sein du clergé, n'en demeure pas moins très éloignée de la doctrine du Vatican.
 
Le saint protecteur des pédophiles, Jean-Paul II, disait lui-même, dans son exhortation apostolique reconciliatio et paenitentia : si [le chrétien] pèche par faiblesse ou par ignorance, il a en lui l'espérance de la rémission, étant d'ailleurs soutenu par la prière commune de ses frères. L’Église catholique a toujours considéré que le péché pouvait être commis par ignorance, et non être la seule conséquence d'un acte moral responsable.

Dans son article 1860, le catéchisme catholique prévoit : « L’ignorance involontaire peut diminuer sinon excuser l’imputabilité d’une faute grave. Mais nul n’est censé ignorer les principes de la loi morale qui sont inscrits dans la conscience de tout homme. Les impulsions de la sensibilité, les passions peuvent également réduire le caractère volontaire et libre de la faute, de même que des pressions extérieures ou des troubles pathologiques. Le péché par malice, par choix délibéré du mal, est le plus grave. »

Et, en son article 1865, il précise : « Le péché crée un entraînement au péché ; il engendre le vice par la répétition des mêmes actes. Il en résulte des inclinations perverses qui obscurcissent la conscience et corrompent l’appréciation concrète du bien et du mal. Ainsi le péché tend-il à se reproduire et à se renforcer, mais il ne peut détruire le sens moral jusqu’en sa racine. »

Contrairement à ce qu'affirme monseigneur Lalanne, l'absence de conscience d'avoir commis quelque chose de mal n'est pas la marque de l'absence de péché, mais bien la marque que le péché s'est enraciné au point d'avoir corrompu l'appréciation concrète de celui qui commet l'acte. C'est ce qui est écrit dans le catéchisme du Vatican qu'il aurait tout intérêt à lire au moins une fois, lui qui est chargé de l'inculquer aux enfants.


Saint Jean-le-Théologien disait : Toute iniquité est un péché, et il y a tel péché qui ne mène pas à la mort (1Jn 5, 17). L'iniquité est l'action contraire à la justice. Il est donc clair que, dans le christianisme, il y a des degrés de gravité, mais que toute action injuste est péché. L'injustice est atténuée par l'ignorance, mais elle n'en demeure pas moins injuste.

Le péché est tout ce qui éloigne l'homme de Dieu. Comme Dieu est amour, le péché est tout ce qui blesse cet amour parfait et pur. Et comme le Christ a dit que tout ce que nous faisons au plus petit d'entre ses frères, c'est à lui que nous le faisons (Matth. 25, 40), blesser l'amour d'un frère revient à blesser l'amour de Dieu.

Dieu pardonne les péchés. Si ceux-ci étaient liés à la conscience de les avoir commis, pourquoi le Christ aurait-il dit : Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font (Lc 23, 34) ?  Là encore, nous voyons que l'ignorance est une circonstance atténuante pour l'homme qui pèche devant Dieu, mais elle ne suffit pas pour affirmer qu'il n'y a pas de péché.

Dans tous les cas, l'ignorance dont il est question n'a aucun lien avec l'obscurcissement de la conscience. L'ignorance est sans malice. La perversion de la conscience est le fruit de la malice.


Les orthodoxes ont une approche moins juridique du péché. Ainsi nous lisons, dans l'office de purification : Remets, pardonne, efface, Seigneur, nos fautes volontaires et involontaires, commises en action et en parole, consciemment ou par ignorance, la nuit ou le jour, dans notre esprit ou notre cœur, pardonne-les, car tu es bon et ami des hommes.

Les orthodoxes ont conscience que nul homme n'est pur devant Dieu (Ps. 143, 2) et que l’offense commise dépasse le cadre de la conscience de celui qui la commet.


Devant le tollé suscité par ses propos, monseigneur Lalanne s'est repris pour affirmer que, finalement, la pédophilie était bien un péché. Il fut obligé de le faire pour des raisons de communication, mais il y a fort à parier qu'il ne croit pas un mot de ce qu'il a dû convenir. 

Lui et monseigneur Barbarin devraient pourtant se rappeler que leur catéchisme affirme, en ses articles 1868 et 1869 : « nous avons une responsabilité dans les péchés commis par d’autres, quand nous y coopérons :
– en ne les révélant pas ou en ne les empêchant pas, quand on y est tenu ;
– en protégeant ceux qui font le mal.
Ainsi le péché rend les hommes complices les uns des autres, fait régner entre eux la concupiscence, la violence et l’injustice. »

samedi 21 mai 2016

218- Le poète glorieux, le prêtre misérable



Ces dernières semaines, le père Nicolas Kakavelakis s'en est pris plusieurs fois au souvenir de personnes suicidées. Ses propos confus, fruits de la sagesse pastorale que nous lui connaissons, ne permettaient pas de savoir s'il était lui-même tenté de mettre fin à ses jours, ou s'il visait un autre but.

L'histoire me rappela le magnifique poème de Victor Hugo sur La conscience, qui tourmenta Caïn par-delà la tombe. Aussi, en hommage à ces deux personnages, le poète glorieux et le prêtre misérable, je dédie les vers qui suivent.


Possédé des désirs d'une vie désœuvrée,
Et mu par les passions dont il était hanté,
 
Déguisé en prêtre, arriva Kakavel,
À Lyon dont il devait desservir la chapelle.
 
S'octroyant le beau rôle et bercé d'illusions,
Il croyait maintenir ses ouailles en prison.
 
Attirant une fille dans son lit d'amoureux,
Il tenta par un film de subjuguer ses yeux.
 

Tel un sot sans cervelle, il apprit après coup,
Qu'on ne saurait cacher ce qu'on fait par-dessous.
 
Ni menaces ni pressions, ni violences ni chantages
Ne purent étouffer l'histoire du volage.
 
Pris dans la tourmente, et telle sa conscience,
Il vit, par devant lui, dressée, une présence.
 
Comme Caïn jadis en avait fait le vœu,
Il voulut lui aussi se soustraire à ces yeux.
 

Sa conscience agissait. Et se trompant de cible,
Il crut la faire taire en la passant au crible.

Ne cessèrent jamais mensonges, calomnies,
Toujours il s'obstinait, abîmé dans sa nuit.
 
Ses manœuvres sournoises, violentes, arbitraires
Firent mieux voir encor son sacré caractère.

Par toutes ces bassesses c'est toujours plus près d'eux,
Qu'au lieu de s'éloigner, il butait sur ces yeux.


Le jour où le tombeau se fermera sur lui,
Léguant aux souvenirs les heures de sa vie

À quiconque sera en pleurs ou en prière,
Trop inquiet de son sort ou naïvement fiers,

À qui demandera s'il est enfin en paix,
Ou bien souhaitera qu'il le soit en effet,

Tel Caïn tourmenté par son crime envers Dieu,
Il dira voir encore et toujours ces deux yeux !


Rien que lucidité peut du cœur apaiser
Les tourments dévorant la conscience outragée.

Ni de nouvelles fautes, pas plus qu'aucune fuite,
N'effaceront jamais les erreurs de conduite.

Réparant ses écarts par un regret fervent,
C'est par une vie juste qu'on apaise le tourment.

Car alors cet impie, soudain devenu pieux,
Percevra la sagesse au tréfonds des deux yeux.


Père N. Kakavelakis - Dessin agiographique - Noël 2010

dimanche 15 mai 2016

217- De Getcha à Kakavelakis : Adamakis



Lorsque le père Placide Deseille a prononcé son homélie L'évêque, c'est l'icône vivante du Christ (Annonce orthodoxe n° 33, sept. 2015, p. 6-7), plusieurs Lyonnais crurent que le père Placide faisait référence aux problèmes de la paroisse orthodoxe grecque de Lyon. Mais nous avons vu dans le message précédent que le père Placide parlait des conflits suscités par la nomination de monseigneur Job Getcha à la tête de l’Église russe exarchat de Constantinople, plus communément appelée Église de la rue Daru.

Mais ils n'avaient pas tort de se poser la question, car de nombreuses similitudes existaient entre ces deux affaires.

1) Tant à Lyon qu'à Daru, le métropolite Emmanuel Adamakis s'arrangea pour imposer un homme dont personne ne voulait à la tête de l'église locale, et usa de toute son autorité pour le maintenir artificiellement en poste : monseigneur Job Getcha à Daru, et le père Nicolas Kakavelakis à Lyon.

2) Getcha et Kakavelakis usèrent des mêmes méthodes délictueuses pour s'imposer et prendre le contrôle des institutions qu'ils convoitaient. Job Getcha organisa un faux tribunal ecclésiastique et rédigea un jugement contre l'un de ses prêtres, en demandant au Patriarche de Constantinople de l'appliquer. Il fit croire que tous les prêtres membres de ce « tribunal » avaient validé sa décision, alors que ceux-ci témoignèrent que ledit « tribunal » n'avait jamais été réuni.

Nicolas Kakavelakis, lui, rédigea un faux compte-rendu d'AG l'autorisant à modifier les statuts. Il les changea aux seuls avantages du métropolite Emmanuel Adamakis et de lui-même.

3) Dans les deux cas, les fidèles refusèrent de se laisser abuser par de telles méthodes indignes des idéaux du christianisme. Les prêtres du « tribunal ecclésiastique » de Job Getcha attestèrent par écrit que le jugement prétendument rendu par ce « tribunal » était un faux grossier.

Les élus de la Communauté hellénique de Lyon déposèrent plainte contre le père Nicolas Kakavelakis pour faux et usage de faux documents.

4) Dans les deux cas, le métropolite Emmanuel Adamakis usa de menaces d'excommunications pour intimider ceux qui n'acceptaient pas ces méthodes indignes et les contraindre au silence (ici et ). Il oubliait sciemment que le 5ème canon du 1er concile œcuménique lui interdisait formellement de s'approprier ainsi les Dons divins, et rendait nulle toute décision d'excommunication qu'il aurait pu prendre : Il faut cependant s'assurer que l'évêque n'a pas porté cette sentence d'excommunication par étroitesse d'esprit, par esprit de contradiction ou par quelque sentiment de haine. Afin qu'un tel examen puisse avoir lieu, il a paru bon d'ordonner que dans chaque province on tînt deux fois par an un synode, afin que tous les évêques de la province étant réunis, on fasse toutes les enquêtes nécessaires.



5) Dans les deux cas, le sort du membre du clergé contesté était scellé d'avance. Job Getcha a déjà été limogé. Nicolas Kakavelakis le sera prochainement. Et s'il ne part pas de lui-même, la condamnation pénale qui l'attend contraindra ses supérieurs à le révoquer.

6) Outre ces similitudes au plan de l'illégalité, il en est une qui relève de l'immoralité, dès lors qu'on maintient en poste, comme le fait le métropolite Emmanuel, des hommes dont les actions font honte à l'orthodoxie qu'ils représentent. En ceci, s'il y avait un seul homme qui devrait légitimement être sanctionné pour tous ces errements, ce devrait être ce même métropolite. Et ce, bien que renvoyer le métropolite à ses divertissements puisse ne pas être une bonne nouvelle pour les garçons de Lesbos.


Mais ce sur quoi je voulais revenir plus en détail, est l'attitude indigne du père Placide Deseille.

Je l'ai longtemps côtoyé dans son monastère. Aussi, lorsque les Lyonnais ont eu des problèmes avec le père Nicolas Kakavelakis, je lui ai envoyé, le 17 mai 2011, le rapport de police et le témoignage de la jeune fille qui se plaignait des agissements de ce dernier, et je lui ai demandé conseil.

Il a répondu que le métropolite lui avait parlé de cette affaire qui le préoccupait, mais sans lui avoir montré le moindre document. Il précisait qu'il ne connaissait pas assez les affaires de Lyon et préféra ne pas s'en mêler.

Je me suis à nouveau tourné vers lui par un courrier du 12 mars 2012, afin de lui redemander son avis sur d'autres affaires qui étaient survenues à Lyon. Il a à nouveau refusé de s'y impliquer.

Et lorsque le métropolite lui-même fut impliqué dans des vacances dont on pouvait se demander si elles étaient bien canoniques, je lui écrivis à nouveau. Je lui soumettais le texte que j'avais publié sur mon blog et lui proposais de rencontrer les témoins, afin qu'il puisse s'assurer de la fiabilité et de la sincérité de leur témoignage. Il ne répondit jamais et refusa ainsi de prendre position.


Pourtant, lorsqu'il fallut prendre la défense du même métropolite, dont il ne pouvait ignorer que sa moralité était au minimum contestée, il prononça cette fameuse homélie appelant à ne pas signer la lettre ouverte qui dénonçait l'attitude de monseigneur Job Getcha. Il dénonçait l'existence même de cette lettre et ses signataires comme ayant une attitude indigne de chrétiens envers leur évêque. Il exhortait ces mécréants à se tourner respectueusement vers les autorités ecclésiastiques s'ils avaient des griefs dont ils souhaitaient leur faire part, mais refusait tout autre moyen d'action.

Or la seule attitude indigne, outre celle de l'évêque en question, était celle du père Placide. Il appelait à se tourner vers le clergé pour régler les problèmes, mais refusait de se pencher sur ceux qui lui étaient soumis. Il savait pertinemment que les Lyonnais s'étaient en vain adressés au métropolite et patriarche pour régler leurs problèmes, sans aucun résultat, mais n'en recommandait pas moins aux paroissiens de Daru de s'en remettre à ces mêmes personnages.

Pour quelle raison agir ainsi alors qu'il savait que de tels conseils étaient inopérants ? 

Il faisait abstraction d'une réalité qui lui était parfaitement connue, pour se contenter de préserver l'illusion des apparences. En ceci, il manqua à ses obligations de pasteur chargé de protéger les êtres qui lui sont confiés.


Au-delà des mots creux de ceux des membres du clergé qui sont avides de pouvoir et de richesses, n'oublions pas que les chrétiens puisent leurs exemples dans l’Évangile et les paroles du Christ. Confrontés à une injustice, le Christ nous cite l'exemple de la veuve importune, qu'il convient de suivre : demander inlassablement justice, jusqu'à ce que nous l'obtenions. 

C'est ainsi que les paroissiens de Daru ont obtenu gain de cause, et ainsi agiront les orthodoxes grecs de Lyon jusqu'à ce qu'il en soit de même pour eux.