de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 28 novembre 2015

186- 1931 à 1933



En 1930, divers éléments permettaient de penser que la présidence de monsieur Nicolas Dhikeos à l'association L'Annonciation relevait plus d'une mainmise politique que d'une volonté réelle d'administration éthique et rigoureuse des intérêts des membres. Il est légitime de supposer qu'il utilisait ce poste aux fins de la promotion de ses ambitions.

Depuis 1921, les AG des associations grecques de fin d'année voyaient toujours les administrateurs rendre leur mandat, afin qu'il soit procédé à de nouvelles élections. C'est un courrier remis au préfet le 23 janvier 1931 qui nous apprendra que monsieur Dhikeos avait refusé de le faire lors de l'AG du 21 décembre 1930. Nous nous rappelons que seuls des membres d'une commission de contrôle avaient alors été élus. Mais le frère de monsieur Dhikeos faisait partie de cette commission, si bien qu'il ne s'agissait là que d'une élection de pure forme, entachée d'un conflit d'intérêt flagrant.

Ce même courrier adressé au préfet précisera qu'une autre réunion du bureau eut lieu le 18 janvier1931, afin de régler la question de la légitimité du président, dont le mandat avait pris fin le 31 décembre. Mais elle ne permit pas davantage de procéder à l'élection d'un nouveau bureau de direction des affaires de l'Annonciation
Entendu que les désordres produits incombent le président élu dans le sein de ce bureau de direction [...] du fait qu'il n'a pas voulu respecter l'ordre du jour. 
Le bureau de direction, après avoir conclu, se juge incompétent et incapable à poursuivre son rôle.
Prend la résolution de décision par  majorité de trois voix contre une, celle de M. Dikaios, suivant les statuts déposés de l'Annonciation et article 15, de démissionner de son rôle et de remettre la direction des affaires de la dite maison de prière et tout objet et archives concernant cette maison et bureau de direction à la commission de contrôle, composée de M. Andriomenos, M. Katras, M. Garbis, qui prend la responsabilité de gérer provisoirement les affaires de l'Annonciation et de procéder à la constitution par élection du nouveau bureau de direction de l'Annonciation.

Monsieur Dhikeos Pierre, bien que membre de la commission de contrôle, n'est pas mentionné dans la liste des membres de cette commission. Il ne sera pas reconnu comme légitime à gérer les affaires courantes et à assumer un rôle en son sein.

Par un acte courageux, les membres du CA destitueront ainsi messieurs Dhikeos. 

Nous trouvons, dans les documents, deux orthographes à ce nom : Dhikeos, ou Dikaios. J'utiliserai Dhikeos, qui est la forme utilisée par l'intéressé lorsqu'il signe un document. Je laisserai écrit Dikaios lorsque je reproduirai un document contenant cette orthographe. Mais les deux manières d'écrire le nom correspondent au même personnage.

Le désaveu de monsieur Nicolas Dhikeos était cinglant. Une AG fut convoquée le 1er février, afin de renouveler le conseil. Monsieur Nicolas Dhikeos ne se représentera pas à sa succession. Le métropolite valida l'élection de ce nouveau conseil, qui se réunit pour décider de l'attribution des fonctions. Monsieur Theodorides fut nommé président. Il était le troisième.

Monsieur Psaltopoulos, qui s'était plaint, le 8 mars 1926, du fonctionnement despotique du conseil de l'Union Philanthropique dont il était administrateur, était nommé membre suppléant de L'Annonciation, garant par son intégrité du bon fonctionnement de l'association, que ses élus avaient enfin décidé de surveiller.
 
La semaine suivante, le 8 février 1931, l'Union Philanthropique réunissait à son tour son AG. Monsieur Roditis redevenait président, après avoir exercé ces fonctions en 1928. Le 23 janvier, Pierre Dhikeos était exclu du conseil de surveillance de L'Annonciation. Le 8 février, il était élu au poste de secrétaire général de l'Union Philanthropique. Le jeune homme ne semblait pas trop perturbé par sa première déconvenue.

Une seconde AG se déroula le 19 juillet. Elle renouvela certains des membres du conseil, mais les postes principaux restèrent attribués aux mêmes personnes.


Que devenait l'Union Démocratique pendant ce temps ? Le préfet se posa la question car, comme nous, il n'avait aucune nouvelle de cette association depuis la démission retentissante de son président, le 2 novembre 1929. Il demanda une enquête à son sujet au Commissaire Spécial près la Préfecture. 

Le 31 octobre, le secrétaire de l'Union Démocratique écrivit au secrétariat général de la police, sise en préfecture, pour dire qu'aucune modification n'était intervenue depuis la déclaration faite le 1er août 1929. Il oubliait de préciser qu'il n'y avait plus de président, qu'aucune AG ne s'était tenue depuis 2 ans, et que l'association n’était plus qu'une coquille vide. Mais la priorité de la police de l'époque n'était pas de s'attarder sur de telles incohérences.

Le 27 décembre, une AG de L'Annonciation se tenait à nouveau, plus sereine. Elle élisait un nouveau conseil d'administration et une nouvelle commission de contrôle. Monsieur Nikitopoulos devenait le 4ème président. La préfecture enregistrait ces modifications le 31 mars 1932.

La même année, le père Constantin Dervissoglou fut nommé pour officier à Lyon.

Père Constantin Dervissoglou


L'Union Philanthropique, elle, tenait son AG le 31 juillet 1932. Il était alors décidé que le nombre de membres du conseil d'administration était trop élevé. Il fut porté de 9 membres à 7 membres. Moins on est nombreux, et plus il est facile d'obtenir la majorité... L'on retrouvait monsieur Nicolas Dhikeos aux manettes. Après avoir été éconduit de L'Annonciation, il prenait les rênes de l'Union Philanthropique et devenait son 10ème président. Son frère n'était pas réélu au sein du conseil d'administration, peut-être victime de la réduction des postes à pourvoir.

Fidèle à son mode de gestion, le nouveau président n'organisera pas d'assemblée générale en décembre 1932, bien que son mandat arrivât alors à échéance. Il n'en organisera pas davantage durant l'année 1933, et restera ainsi en poste sans légitimité, par la force des choses.


La fin de l'année 1932 sera marquée par la tenue d'une AG, le 18 décembre, qui modifiera les statuts de L'Annonciation. Nous avons une idée, grâce à cette modification, de ce que furent les statuts originaux, car ces modifications ne portent que sur deux points :
- la création d'une caisse autonome de réserve et de collecte, indépendante de la gestion de la Maison de Prière, avec but purement et strictement visé, l'érection d'une Eglise Orthodoxe Grecque à Lyon, avec dépendances nécessaires.
- le second point vise à porter le mandat du conseil d'administration de un à deux ans.
Ces statuts sont accessibles ici.

Après Pont-de-Chéruy en 1917 et Saint-Étienne le 30 novembre 1930, les Grecs de Lyon se projetaient dans l'avenir et envisageaient de construire une vraie église pour l'exercice de leur culte.

L'Annonciation prenait alors un tournant dans son existence. Il sera possible de s'en apercevoir dès l'année suivante.

mercredi 25 novembre 2015

185- 1929 à 1930



1929 sera une année importante dans la vie de la communauté des Grecs de Lyon. Nous y retrouvons ce que les Grecs savent faire de mieux : la volonté de changer les choses et les divisions.

L'année commence par l'AG du 13 janvier, qui voit monsieur Nikitopoulos redevenir président après quatre mois, durant lesquels monsieur Roditis avait assumé cette charge.


Il va falloir ici compliquer un peu le récit, en intégrant la vie de nouvelles associations dont les destins se croiseront.

Le 20 février, l'église orthodoxe grecque que nous connaissons aujourd'hui informe le préfet de son existence. L'association L'Annonciation s'est constituée au mois de septembre 1928, et déposait ses statuts en février 1929. Malheureusement, les archives ne conservent pas la trace de ceux-ci.

Monsieur Kaktzis en est le premier président. Son siège est au 4, place Raspail, dans le 7ème arrondissement. Son objet est l'exercice du culte.

L'Annonciation choisit ce patronyme, dont la fête est célébrée le même jour que celle de l'Union Philanthropique.

Est jointe à la déclaration de création une liste de 111 membres fondateurs, comprenant leurs adresses et professions. Nous y retrouvons les mêmes personnes que dans l'Union Philanthropique, comme messieurs Psaltopoulos, Berberoglou, Roditis, Hourchoglou, Christodoulou, Papadimitriou, Cazanovas (tous membres du conseil d'administration de l'Union  Philanthropique en 1921), etc.

Comme nous l'avons déjà relevé, l'église grecque existait déjà, et il était fait mention de l'aide à lui apporter dans les statuts de l'Union Philanthropique le 19 décembre 1921. Cependant, en septembre 1928, elle se constitue en entité juridique et déclare sa création en préfecture.
 
C'est à la même époque que fut créée, le 1er avril 1929, l'Union Démocratique des Hellène de Lyon ! Elle fut le fruit d'une scission d'avec l'Union Philanthropique. Nous retrouvions dans le bureau originel de l'Union Démocratique des personnes que nous avions côtoyées dans le bureau de l'Union Philanthropique. Par exemple, monsieur Roditis, élu conseiller à la création de l'Union Démocratique, avait été président de l'Union Philanthropique entre le 16 septembre 1928 et le 13 janvier 1929. Bien que membre du conseil d'administration depuis la création, il avait abandonné l'Union Philanthropique en même temps que la présidence au bout de 4 mois, vraisemblablement à cause de divergences de fond.

Le siège de l'association est au 11 cours Gambetta, à Lyon 3ème. Ses statuts ne comportent que 9 articles, très courts. Ils visent l'organisation d'activités sportives, d'excursions et à la pratique de la danse. L'association a également en charge de porter secours en cas de maladie d'un membre, ou de pourvoir aux frais de son hospitalisation. Elle secours les orphelins et les « sous-emploi » suivant le trésor de la caisse. Elle est administrée par 5 membres. Un membre condamné ou ayant une conduite indigne sera renvoyé.

En cas de dissolution, le trésor sera partagé entre l’Église grecque à Lyon et les grands mutilés de la guerre.  Nous voyons donc que la cause de la scission avec l'Union Philanthropique n'était pas le fait de ses liens avec l’Église, car l'Union Démocratique revendiquait les mêmes liens (art. 7).

Bien que l'article 5 fasse déjà mention de l'impossibilité pour un membre de faire partie de l'association si sa conduite à l'égard de la société française n'est pas irréprochable, l'article 9 reviendra sur ce point, avec d'autres mots. Une telle insistance, sur un texte si court, laisse supposer que l'Union Philanthropique avait déjà été confronté à une telle situation, mais avait cru bon de fermer les yeux.  C'était sans doute ce qui avait poussé monsieur Roditis à démissionner, et était à l'origine de cette nouvelle association.

Cette Union Démocratique précisera, dans un courrier adressé au préfet accompagnant les statuts, avoir pour but de protéger, et secourir nos malheureux citoyens en cas de leurs besoins, d'un mot notre société sera philanthropique... Mais aucune allusion, ici, à un quelconque lien avec l’Église. 25 personnes seront membres de cette association à sa création. C'était la quatrième association rivale de l'Union Philanthropique créée en huit ans. Monsieur Katras, représentant de commerce, en est le premier président. Il est domicilié au 12, rue de la Vigilance, chez madame Stuby.

Le 12 mai, le conseil d'administration se réunit pour former son bureau. Le document notifiant la liste des membres du bureau fut déposé à la préfecture le 3 juin.

Pourtant, la déclaration de monsieur Katras, outre qu'elle recelait de nombreuses fautes d'orthographe, ce qui était très rare dans tous les documents de l'époque, était mal remplie. Le préfet demanda au commissaire de police de la Guillotière de prier l'intéressé de compléter sa déclaration, et de s'acquitter de la somme de 3 francs 60 (anciens) pour le timbre du récépissé.

Le Commissaire sera saisi le 9 juillet et rendra compte de son enquête le 24 juillet en produisant une lettre de madame Stuby :
Suivant votre avertissement concernant Mr. Katras, il n'est plus chez moi. Il a dû quitter Lyon, m'a-t-il dit, pour raison de santé. Je crois qu'il doit être à Grenoble. Pour plus amples renseignements, vous pourriez vous adresser au coiffeur de la rue Vigilance, n°5. Il tient une pension de famille. C'est un Grec également. M. Katras y allait très souvent.

L'excuse de raison de santé semblait « vaseuse ». M. Katras déposait un dossier en préfecture et, quelques jours plus tard, lorsqu'on lui demandait de compléter le dossier, il avait disparu pour raisons de santé, plaquant là sa compagne qui l'hébergeait, bien qu'il soit possible de retrouver sa trace dans une pension de famille où il avait l'habitude d'aller...

Afin de répondre au commissaire de police, ce qui restait de l'Union Démocratique se réunissait le 23 juillet. Elle prenait acte de la démission de son président, mais également de son vice-président et d'un conseiller. Monsieur Tsitsinopoulos devenait le second président et payait les 3 francs 60 demandés.

Messieurs Tsitsinopoulos et Angelidis démissionnaient à leur tour le 5 novembre et en informaient personnellement le préfet. Ils firent bien, car ce qui restait du conseil d'administration était mort-né. Nous n'aurons que quelques nouvelles sporadiques jusqu'à leur disparition.
 
De son côté, l'Union Philanthropique  réunit son conseil le 10 novembre pour procéder au remplacement de trois membres démissionnaires.
 
En 1930, L'Union Démocratique n'eut pas d'activité.
 
Quant à l'Union Philanthropique, elle n'eut qu'une seule AG dans l'année, le 19 janvier, tout comme l'année précédente, contrairement à ses statuts. Son action commençait à être atrophiée par l'activité de l'Annonciation. Monsieur Kaloutsis, domicilié rue Bancel, à Lyon 7ème, est nommé président. Il sera le 9ème président. Le siège social est transféré au 11 cours Gambetta, dans le 3ème arrondissement, c'est-à-dire au même endroit que l'Union Démocratique.
 
La vie de L'Annonciation fut un peu plus mouvementée. L'Annonciation tiendra son AG le 13 janvier. Monsieur Nicolas Dhikeos, antiquaire, est nommé président, et ce bien qu'il ne fût pas sur la liste des 111 membres fondateurs.

Depuis 1921, c'est la première fois que le président d'une des associations grecques ne se déplace pas pour remettre au préfet le procès-verbal de l'AG, mais qu'il envoie le secrétaire pour le faire à sa place.

Sans doute peu habitué à être contesté, monsieur Dhikeos informe le préfet, le 28 août 1930, qu'il a changé le conseil d'administration. Il ne fait mention d'aucune AG, ni d'aucune réunion du conseil d'administration pour justifier de son choix. Il l'informe également que le siège social est transféré au 8, rue Paul Bert.

Le 21 décembre, l'AG ne se prononcera pas sur le renouvellement du mandat de monsieur Nicolas Dhikeos, mais seulement sur la nomination de membres de la commission de contrôle pour l'année 1931. Et, pour surveiller les activités du président, sera nommé un étudiant, Pierre Dhikeos, domicilié au 117, rue Pierre Corneille, chez son frère, président qu'il avait en charge de contrôler...

Je ne dis pas que cela masquait des malversations. Et je pense même que les personnes de l'époque avaient à cœur de donner plus que de prendre.  Mais après avoir eu une association très paternelle et altruiste, qui se transforma en organisation juridique, elle évoluait à nouveau dans sa manière de fonctionner, pour se contenter de paraître et de superficialité. Une évolution dont nous n'avons malheureusement pas fini de devoir assumer les conséquences.

Il faut croire que le préfet n'apprécia pas cette manière de fonctionner. Il demandera au Commissaire Spécial près la Préfecture de bien vouloir diligenter une enquête, avec prière de fournir tous renseignements utiles sur l'activité de cette cultuelle ainsi que sur les membres de son conseil d'administration. Le commissaire répondra, dans une note laconique, que ces personnes ne font l'objet d'aucun renseignement défavorable.

Nous verrons dans le prochain message que 1931 ne fera que confirmer les craintes de cette dérive, qui faisait doucement perdre le sens de ce qui avait poussé les Grecs à s'unir pour se soutenir.

samedi 21 novembre 2015

184- 1926 à 1928



L'année 1926 commence par une assemblée générale, le 24 janvier. Le conseil d'administration démissionne pour procéder à de nouvelles élections. Monsieur Nikitopoulos est reconduit à son poste de président.


Une lettre, que monsieur Photis Psaltopoulos adressera à monsieur le préfet le 8 mars 1926, permettra d'avoir de nombreuses informations sur la face cachée de cette association. Cette lettre est reproduite ci-dessous :

Il existe à Lyon, depuis décembre 1921, une Société connue sous le nom : " UNION PHILANTHROPIQUE DES HELLÈNES DE LYON ". Cette Société, jusqu'à présent, a fait honneur à notre Colonie sous la direction de gens doués de sentiments nobles tant envers l'Hellénisme qu'envers la France. 
Malheureusement, ces temps derniers, une clique composée de gens qui n'ont pas conscience de leurs actes est arrivée, par différents moyens, à prendre le pouvoir et déclarer une dictature dans le sein de la Société, se permettant de rayer du cadre de cette dernière les membres honnêtes qui lui font honneur ainsi qu'à la Colonie Grecque de notre Ville. Ils excluent des membres du Conseil même d'Administration qui ont été nommés par l'Assemblée Générale. Afin de mettre fin à cet état lamentable de choses, plusieurs membres se sont réunis et ont envoyé une lettre à ces Messieurs pour leur demander à appeler une réunion générale à seule fin d'arriver à une entente amicale et satisfaire ainsi aux revendications de plus de 60 membres. Malheureusement cette lettre envoyée il y a plus d'un mois est restée sans réponse. Il y a 8 jours moi-même, un des plus anciens membres de la Société, vu la pénible situation où la Société se trouve, j'ai cru nécessaire, ceci pour éviter toute scène qui serait peut-être fâcheuse, d'envoyer une lettre au Conseil par laquelle tout en leur rappelant celle envoyée par une quarantaine de membres qui est restée sans réponse, je leur prie de fixer une réunion générale pour résoudre tous les malentendus qui ont pu naître au sein de la Société pour des raisons diverses. Cette lettre est restée également sans réponse. 
C'est donc pourquoi je prie votre haute bienveillance de bien vouloir me conseiller sur la marche à suivre afin de mettre fin à cette pénible situation qui met en jeu le prestige de notre Société.
Veuillez agréer, Monsieur le Préfet de Police, avec mes remerciements anticipés, l'assurance de ma haute considération.

Le Préfet ne tardera pas à s'inquiéter de la situation. Dès le 12 mars, il rédige un courrier manuscrit, que sa secrétaire dactylographiera, et saisit le Commissaire Spécial près la Préfecture, afin qu'il recueille discrètement tous renseignements utiles tant sur le nommé Psaltopoulos que sur le fonctionnement de l'Union Philanthropique des Hellènes de Lyon et les incidents qui auraient lieu au sein de cette société.

Le Commissaire Spécial rendra son rapport le 19 mars. Ce texte est d'une grande richesse. 

Il revient tout d'abord sur l'enquête de moralité concernant monsieur Psaltopoulos. Celui-ci est un citoyen honorable qui a satisfait aux obligations de recrutement dans son pays d'origine, et qui a été mobilisé durant la guerre. Il est marié, père de famille, et en instance de naturalisation. Il exerce la profession de polisseur sur métaux.

Puis le Commissaire Spécial revient sur l'Union Philanthropique, son siège et ses statuts. Il écrit ensuite :

A sa fondation, cette organisation a groupé 200 membres mais à la suite de divergences de vues, provenant de ce que certains de ses membres demandèrent la création de groupements sportifs, athlétique, excursionniste, etc., contrairement aux termes des statuts, et aussi de ce que d'autres réclamèrent que les fonctions administratives de la Société soient occupées par des membres compétents et offrant toutes garanties désirables, un mouvement de dissidence se produisit.
En juin 1922, les mécontents, au nombre d'une vingtaine fondèrent une autre Société qui prit pour titre " Société Amicale des Hellènes de Lyon ", ayant son siège 54 cours de la Liberté au Café Maigne. Elle compte actuellement 28 membres après avoir réussi à en grouper une cinquantaine.
En 1925, pour les mêmes raisons, fut créée une autre Société ayant pour titre " Acropoulos ", ayant son siège, 4 place du Pont, au Café du Nouveau Centre et pour but la pratique des sports.
Vers la fin de la même année, un groupe composé de membres de toutes ces sociétés créa " L'Union Panillinique ", dans le but de regrouper dans une seule organisation tous les Hellènes de Lyon. Ce groupement a prévu sa dissolution prochaine si le résultat recherché n'est pas atteint. Il compte actuellement 30 membres et son siège est à Villeurbanne, 6 place de la Bascule.
Le sieur Psaltopoulos est membre du Conseil d'Administration de la " Société Philanthropique des Hellènes de Lyon ".

Entre 1922 et 1925, trois associations concurrentes à l'Union philanthropique se sont donc créées à Lyon. Toutes dans des cafés. Mais leur rayonnement resta limité. Tout comme, d'ailleurs, celui de l'Union Philanthropique, qui ne retrouvera pas le nombre d'adhérents de sa première année. 

Il est inévitable que des personnes tentent de s'accaparer le bénéfice du travail des autres, surtout dans des associations. Tout aussi inévitable que ces personnes cherchent à évincer celles qui, de par leur présence, les mettent face à leur propre médiocrité. Mais ces personnes ne peuvent pas s'attendre à prospérer, car elles savent prendre, mais pas donner. Le développement de telles associations ne peut se faire que dans l'union et l'harmonie. L'union réelle, et non celle des mots.

Il n'y eut pas de suite au courrier de monsieur Psaltopoulos. Le conseil se réunit le 13 avril 1926 pour remplacer son vice-président, malade, par monsieur Campouropoulos.

L'AG du 19 décembre 1926 verra monsieur Campouropoulos nommé au poste de président. Il sera le 7ème président. Seuls sont renouvelés quelques membres du conseil d’administration. Tout comme pour l'AG du 16 septembre 1927.

1928 est tout aussi calme, avec son AG du 8 janvier, qui se contente de renouveler le conseil d'administration. Monsieur Nikitopoulos retrouve son poste de président. Il en sera de même pour l'AG du 16 septembre, qui verra monsieur Roditis devenir le 8ème président.

Au même moment, en septembre 1928, sera créée une maison de prière, administrée par un Conseil Ecclésiastique. La confusion des genres durera jusqu'à aujourd'hui, où la page historique du site de la Communauté hellénique de Lyon n'arrive pas à distinguer qui est président de quoi, comme nous le verrons dans le prochain message.

1928 - Communauté des Grecs de Lyon