Nous pouvons lire, sur le site de la Communauté hellénique de Lyon, que La Communauté hellénique de Lyon et des environs a été fondée en
1929 par des ressortissants grecs de Grèce et d’Asie-Mineure, venus en
France pendant le conflit gréco-turc, dans le but de sauvegarder leur
culte, leur culture et d’offrir un lieu de rencontre aux Grecs exilés.
Une
telle affirmation est tout autant simpliste qu’erronée. Elle relève de
la volonté de récupération plus que de la réalité historique. C'est
pourquoi il nous faut y revenir ici.
Comme tout le monde le sait, Adam et Eve sont Grecs ! Je me passerai d'établir plus en détail ce point, puisque, comme l'a très bien relevé l'acte fondateur du tribunal de Nuremberg, en ses articles 19 et 21, les faits de notoriété publique seront tenus pour acquis. Et ce, bien que quelques Libanais estiment qu'il ne fait aucun doute qu'Adam et Eve soient libanais... Mais laissons là la localisation du Paradis, bordé de ses quatre fleuves mythiques, et rapprochons-nous de quelques siècles.
Même si Marseille fut fondée par des Grecs, qui y débarquèrent 600 ans avant Jésus Christ,
il serait là aussi peu crédible d'y voir les origines de notre Communauté.
Je sauterai donc à nouveau quelques siècles et me rapprocherai de la révolution industrielle, au milieu du XIXème siècle, et au début du XXème.
À
cette époque, l'immigration fut très importante en France. Les
industries se développaient et avaient un grand besoin de main-d’œuvre.
Dans le même temps, la pauvreté des pays balkaniques, moyen-orientaux ou
nord-africains, poussait les populations à s'exiler.
Ainsi, la grande épopée industrielle de la famille Grammont, à Pont-de-Chéruy, commença en 1849, par la création des ateliers de tréfilage. Cette famille participa à l'effort de guerre à partir de 1914, ce qui contribua au développement spectaculaire de leur entreprise.
Le 10 août 1916, arrive le premier convoi de « Grecs »3 de Turquie à Charvieu. Le chemin de fer de l'Est lyonnais dépose en quelques jours 1200 personnes en provenance de Marseille, sur demande expresse de Grammont4. Pour ces arrivants et leurs successeurs, le directeur va projeter la construction d'une ville complète... (source)
En 1917 est posée la première pierre de l'église orthodoxe grecque.
Ainsi, la grande épopée industrielle de la famille Grammont, à Pont-de-Chéruy, commença en 1849, par la création des ateliers de tréfilage. Cette famille participa à l'effort de guerre à partir de 1914, ce qui contribua au développement spectaculaire de leur entreprise.
Le 10 août 1916, arrive le premier convoi de « Grecs »3 de Turquie à Charvieu. Le chemin de fer de l'Est lyonnais dépose en quelques jours 1200 personnes en provenance de Marseille, sur demande expresse de Grammont4. Pour ces arrivants et leurs successeurs, le directeur va projeter la construction d'une ville complète... (source)
En 1917 est posée la première pierre de l'église orthodoxe grecque.
Mais devant
les besoins croissants, monsieur Grammont fit appel aux Italiens, aux Russes qui fuyaient la
révolution d'Octobre, aux Arméniens chassés de Thrace par les Turcs, aux
Polonais par recrutement dans leur pays, ...
Toute cette main d’œuvre était nécessaire pour pourvoir les 1900 postes de
l'usine en 1917.
Les Yougoslaves puis les Maghrébins sont ensuite venus chercher du travail.
En
1980, l'agglomération comptait 5650 étrangers pour une population de 18180
personnes, soit un pourcentage de 31%, sans tenir compte des Français
d'origine étrangère arrivés en début du siècle (estimation totale : environ
60%). 23 nationalités différentes cohabitaient.
Les plus nombreux étaient les Algériens (1841) suivis des Italiens (725), des
Marocains (625), des Tunisiens (303), des Turcs (300). Il existait aussi des
communautés grecques, yougoslaves, espagnoles, polonaises,...
Charvieu-Chavagneux abritait 41% d'immigrés (2883 sur 7000); Pont de Chéruy
31,8% (1226 sur 3850), Chavanoz 25,5% (937 sur 3670) et Tignieu-Jameyzieu 16,5%
(604 sur 3660).
On lui donnait le surnom de "tour de Babel sur Isère".
Le Monde relata cette épopée dans son édition du 4 mars 1989.
Le Monde - samedi 4 mars 1989 - Pont de Chéruy les fils de l'Histoire |
Mon
arrière-grand-père maternel quitta son village du sud de l'Albanie et
suivit cette immigration. Il partit ainsi avec ses fils, d'abord au
Brésil. Mais il n'y trouva que la misère, et repartit dans son pays. Il
émigra ensuite en France, en 1924, comme une grande partie des habitants
des villages de sa région. Lorsqu'il se présenta pour travailler, dans
les mines de charbon de Saint-Étienne, la file des postulants était
longue devant le bureau d'embauche.
Mais un homme vint le voir, le sortit de la file, et lui proposa du travail. Mon arrière-grand-père était gêné et fit remarquer qu'il y avait beaucoup de gens devant lui. Ce à quoi l'homme lui répondit. Oui, mais toi tu es blanc. Malgré le fait qu'il cherchait du travail dans la mine, par nécessité, il avait peur de descendre sous terre, et demanda d'avoir un poste en surface, ainsi que pour ses fils. Ce qu'il obtint.
Il
décida pourtant de partir pour s'installer à Pont-de-Chéruy, où il fut
embauché dans l'usine de monsieur Grammont. Mon arrière-grand-père et
mon grand-père maternels y travaillèrent jusqu'à leur retraite.
Mon grand-père paternel, lui, n'eut pas cette chance. Il était de Himara et avait également émigré à Saint-Étienne pour pouvoir manger du pain.
Il travailla à l'extraction du charbon jusqu'à ce que la maladie
l'emporte. Les médecins l’autopsièrent à sa mort et lui reconnurent un
taux d'invalidité de 100%. Une reconnaissance post-mortem qui permit à
ma grand-mère de percevoir une pension. Les poumons étaient englués de
poussières de charbon et étaient devenus totalement incapables de fixer
l'oxygène.
Nous étudierons davantage la situation de
Lyon dans le prochain message, mais dire que la Communauté hellénique de
Lyon s'est constituée par des ressortissants grecs de Grèce et d’Asie-Mineure, venus en
France pendant le conflit gréco-turc, dans le but de sauvegarder leur
culte, leur culture et d’offrir un lieu de rencontre aux grecs exilés, participe d'une propagande ecclésiastique qui tend à vouloir tout ramener à elle.
Que
le père Nicolas Kakavelakis, précédent directeur de la publication, ait
publié un tel texte, peut prêter à sourire. Mais que ma cousine, qui revendique
à son tour ce titre pompeux, lui emboîte le pas en laissant écrites de
telles inepties, revient à nier la réalité historique dont elle-même est
issue.
1937 - Mariage de mon grand-oncle - grand-père de notre présidente |
Je ne dis pas que les Grecs n'ont pas fui au moment de l'exode d'Asie Mineure.
Beaucoup ont alors trouvé asile en France, aux États-Unis ou ailleurs.
Je dis par contre que la communauté grecque de Lyon et des villes
environnantes s'est construite en premier lieu sur une immigration
économique.
Depuis quelques mois, nous assistons au même processus avec les vagues d'immigration massive
qui déferlent sur l'Europe. Beaucoup de ces personnes fuient les
islamistes modérés et immodérés qui détruisent la Syrie ou l'Irak. Mais
beaucoup viennent également de régions du monde qui ne sont pas en
guerre, en quête de travail et de nourriture, comme mes aïeux ont pu
l'être en leur temps.
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