de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 26 novembre 2016

229- Culturel ou cultuel ?



Nous avons vu dans le précédent message que la Communauté hellénique de Lyon a inauguré un centre culturel hellénique en 1973. Mais cette communauté ne revendiquait-elle pas des buts cultuels ? Comment une église pouvait-elle créer un centre culturel ?

Il faut ici rappeler quelques règles fondamentales des associations. En droit français, il existe des associations relevant de la loi de 1901 et d'autres de la loi de 1905. Pour être une association 1901, il suffit d'être 3, de constituer des statuts et de déclarer la création de l'association à la préfecture.

Être reconnu comme une association cultuelle est plus complexe. Selon les articles 18 et 19 de la loi du 19 décembre 1905, les associations cultuelles sont des associations formées pour subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice public d'un culte. 
Elles doivent avoir exclusivement pour objet l'exercice d'un culte. De ce fait, les activités d'ordre culturel n'entrent pas dans le domaine d'action des associations cultuelles. 
Il ne suffit pas qu'une association déclare dans ses statuts être une association cultuelle, pour en avoir le statut juridique. 
Ce statut est accordé par [les soins du préfet] suite à une procédure de rescrit administratif. La reconnaissance d'association cultuelle est valable 5 ans, et doit être renouvelée.





L'avantage premier d'une association cultuelle est de pouvoir recevoir des dons et des legs en étant exonérée d'impôts.

Rien n'empêche une association culturelle loi 1901 d'avoir des buts cultuels, de gérer une école, d'organiser des voyages, etc. Simplement, elle devra déclarer les dons qu'elle perçoit. Une association loi 1901 peut donc avoir des buts cultuels, mais une association loi 1905 ne peut pas avoir de buts culturels.
 

École grecque de Lyon - arbre de Noël - décembre 1975

Comme l'a très bien exprimé le préfet du Rhône, représenté par son secrétaire général adjoint, monsieur Denis Bruel, dans le courrier reproduit plus haut, c'est lui qui accorde la reconnaissance cultuelle à l'issue d'une procédure de rescrit administratif.

Lorsque nous avons étudié l'histoire de la Communauté hellénique de Lyon, au travers des archives de la préfecture, nous avons vu  qu'entre 1921 et 1994, la Communauté hellénique n'a jamais demandé de reconnaissance cultuelle. Ce n'est que le 23 décembre 1994 que le préfet du Rhône accordera cette reconnaissance. 

Il s'agissait alors d'accepter un don conséquent qui allait être utilisé pour parer l'église d'un revêtement de pierres.

Cette reconnaissance prendra fin au 1er janvier 1999. Elle sera accordée à nouveau le 30 juillet 2002, et sera valable jusqu'au 31 décembre 2007.

Nous voyons donc qu'en l'espace d'un siècle, l'association que nous connaissons comme l'église grecque de Lyon n'a été reconnue comme étant exclusivement cultuelle que deux fois. Les deux fois, c'était pour obtenir un avantage matériel, et non spirituel. Le reste du temps, elle était culturelle.

C'est parce qu'elle était une association culturelle que le gouvernement grec lui accorda une aide pour financer la création d'un centre culturel hellénique. Il s'agissait de promouvoir l'hellénisme et non l'orthodoxie, même si cela se faisait avec la bénédiction du métropolite Mélétios.

Camp d'été des guides hellènes à Cassis sur Mer - 1948

Ainsi, lors de la création officielle de l'école grecque de Lyon, Catherine Tsangarakis, administratrice de l'association, écrira à l'inspecteur d'académie, le 20 mai 1975 : Nous venons par la présente lettre porter à votre connaissance l'ouverture d'un cours de langue et civilisation grecques fonctionnant sous la responsabilité morale de la Communauté Hellénique de Lyon, association régie par la loi de 1901 et déclarée à la Préfecture du Rhône.


Trois mois après sa création, en 1921, le préfet du Rhône recevait la première lettre l'informant d'irrégularités de fonctionnement au sein de cette association. Ce fut ensuite une longue succession de divisions et de luttes de pouvoir où le culte avait bien du mal à cohabiter avec la philanthropie et la culture. De ces divisions naquirent plusieurs associations qui cohabitèrent plus ou moins bien.

Le culte prit l'ascendant en 1934, mais cela ne mit pas fin aux divisions, ni aux aspirations contradictoires.

C'est le 13 décembre 1954, sous l'action de Mélétios, qui allait devenir le premier métropolite de France, que les Grecs de Lyon trouvèrent un fonctionnement qui allait unifier tout le monde. Mélétios mit fin aux obligations de cotisation pour être reconnu comme membre de la Communauté et y avoir un droit de vote. Il abolit les anathèmes qui avaient conduit à l'exclusion de nombre d'adhérents, avec leur famille. Il unifia une communauté de prière et une union philanthropique au sein d'une association qui prit le nom de Communauté Hellénique de Lyon et des environs - Association cultuelle orthodoxe « L'Annonciation ».

De fait, même si le nom faisait mention du culte, cette association serait une association culturelle relevant de la loi de 1901. Elle n'aurait de cesse d'organiser le fonctionnement d'une école, des activités de scouts, des voyages, des fêtes, une entraide envers les plus démunis, etc.

Ce fut du moins ce qui se passa jusqu'à l'arrivée du père Nicolas Kakavelakis...

samedi 19 novembre 2016

228- Centre culturel hellénique de Lyon



L'église orthodoxe grecque de Lyon fut érigée en 1948, au lendemain de la seconde guerre mondiale. Le terrain attenant situé à l'arrière de l'église faisait partie du bail emphytéotique concédé par les Hospices Civils de Lyon. Il resta longtemps vierge de toute construction.

25-03-1952 : Guides hellènes sur le terrain attenant à l'église grecque de Lyon


Vers la fin des années 60 commença à germer l'idée d'utiliser ce terrain pour y implanter un centre culturel hellénique. C'est ainsi que des appels aux dons furent lancés.

La Grèce accorda une aide de 2 000 dollars pour cette construction, soit 11 048 francs, somme qui fut versée depuis un compte de la banque de Grèce à New York, sur un compte du consulat de Grèce, à la Wesminster Foreign Bank, à Lyon, le 18 décembre 1970.

De nombreux Grecs de Lyon contribuèrent au financement de ce centre culturel, ce qui permit de récolter la somme de 184 683 francs

Monsieur Louis Pradel, maire de Lyon, fut invité à la pose de la première pierre, le 5 décembre 1971. Il fut représenté par  monsieur Lorenzi.

06-12-1971 - L'écho la Liberté - 1ère pierre Centre Culturel Hellénique

Le Centre Culturel Hellénique de Lyon fut inauguré en 1973, en présence de Son Excellence Monsieur l'Ambassadeur de Grèce.
 
Inauguration du Centre Culturel Hellénique - 1973

La même année, le 16 décembre 1973, fut renouvelé le Conseil d'Administration de l'association Communauté Hellénique de Lyon. Y fut notamment élue madame Catherine Tsangarakis, première femme à intégrer ce Conseil depuis sa création, en 1921. Plusieurs autres généreux contributeurs à la création du centre culturel furent également élus au Conseil.

12-05-1974 : Comité de la Communauté hellénique de Lyon


Nombreux furent les membres d'alors qui marquèrent l'histoire de cette communauté.

12-05-1974 : Communauté hellénique de Lyon


Catherine Tsangarakis fut chargée de structurer et de développer l'école grecque, qui pouvait désormais être accueillie au sein des locaux du Centre Culturel Hellénique.

Madame Tsangarakis et monsieur Lambrinidis rencontrèrent à Athènes le Secrétaire d’État aux affaires étrangères, Jean Varvitsiotis, en novembre 1974. Le contenu de leur entretien est disponible ici.

L'année scolaire 1974-1975 marqua une transformation radicale de l'école grecque de Lyon. Monsieur Athanassios Liacos fut le premier enseignant appointé comme tel par le gouvernement grec. Les programmes scolaires grecs officiels furent mis en application, les enfants étant formés selon leur niveau et classe d'âge. Il y eut cette année-là 45 enfants inscrits.

15-05-1974 : enfants de l'école grecque de Lyon


Dès sa prise de fonction, madame Tsangarakis s'attacha à ancrer cette école dans la règlementation française. C'est ainsi qu'elle écrivit au Préfet du Rhône, le 20 mai 1975, pour s'enquérir des dispositions qu'elle devait respecter.

Le même jour, elle écrivit également à l'Inspecteur d'Académie du Rhône, nommé Claudel.




Ce dernier répondit le 30 octobre 1975, après avoir sollicité le ministre de l'éducation de l'époque, René Haby. Aujourd'hui encore, l'école grecque de Lyon fonde son fonctionnement sur les modalités ainsi définies à son origine : Il y a lieu de considérer vos cours de langue et civilisation grecques comme activité culturelle. En effet, l'enseignement étant dispensé en dehors des heures et jours de classes, dans des locaux de la Communauté hellénique et sous l'égide du gouvernement grec, aucune déclaration selon l'une des lois fondamentales de l'enseignement privé ne doit être exigée.



C'est du moins ce qu'elle a fait jusqu'à ces derniers jours...