de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

jeudi 10 décembre 2015

189- 1948 à 1952



Le 16 mai 1948 fut posée la première pierre de l'église orthodoxe grecque que nous connaissons aujourd'hui.
 
église orthodoxe grecque de Lyon - pose de la première pierre - Le Progrès du 17-05-1948
 
 
L'article du Progrès, écrit à cette occasion, mentionne que les Grecs de Lyon et de la région sont environ 4000. Ils célèbrent leur culte dans une chapelle provisoire, 92, Grande-Rue de la Guillotière ; mais une église, dont la première pierre a été posée hier matin, va être édifiée à leur intention à l'angle des rues Dumoulin et du Colombier. 
S. E. l'ambassadeur de Grèce en France assistait à la cérémonie ainsi que M. Pappaduka, consul de Grèce à Lyon et M. Balabanoglou, président de l'Association cultuelle hellénique orthodoxe, qui a pris l'initiative de la construction. Les bénédictions rituelles ont été faites par Mgr Germanos, métropolite de Thyatira, chef de l’Église grecque de l'Europe occidentale et centrale. 
Un vin d'honneur fut ensuite offert par le comité au cours duquel les jeunes filles des guides hellènes de Lyon - présidées par Mme Hardaloupos - ont interprété des danses et chansons grecques très applaudies.
 

Le Progrès rédigera un autre article le 14 septembre 1949 pour annoncer la fin prochaine de la construction de cette église. Il relate que, depuis environ un an, les ouvriers de la coopérative lyonnaise L'Espoir bâtissent, à l'angle des rues du Colombier et Dumoulin, une église grecque, de rite orthodoxe. Là où se trouvaient, jadis, les dépendances d'un marchand de bois et d'une entreprise de maçonnerie. Le nouvel édifice en ciment et mâchefer prend déjà fière allure. Le campanile est presque achevé et la croix surmontant le bulbe byzantin s'élance vers le ciel. Bientôt, les maçons laisseront la place aux charpentiers et aux décorateurs et, dans quelques mois, le temple pourra être ouvert au culte.

église orthodoxe grecque - en voie d'achèvement - Le Progrès du 14-09-1949


L'église fut inaugurée et consacrée le 23 octobre 1949, par monseigneur Germanos de Thyateira. C'était le dimanche précédent la fête nationale grecque du 28 octobre, et les Grecs célébraient officiellement leur fête ce jour-là.

23-10-1949 consécration de l'église orthodoxe grecque de Lyon - L'écho-La Liberté du 24-10-49


Si le culte exercé dans le bâtiment relevait de l'autorité du métropolite de Thyateira, celui-ci ne disposait pas de la propriété du bien. Elle appartenait à l'Association Cultuelle Hellénique Orthodoxe, fondée l'année précédente qui, contrairement à L'Annonciation, n'avait aucun compte à rendre au métropolite, ni à aucune autorité religieuse.

Le métropolite Germanos Strinopoulos officia jusqu'en 1951 et fut remplacé par le métropolite Athénagoras Kavvadas. La même année, le père Constantin Dervissoglou se trouva dans l'incapacité d'exercer son ministère à cause d'une maladie grave. Il fut remplacé par le père Vlassios en 1952.

Né en 1920 en Thessalie, Vassilios Koutsoyiannis a fréquenté, comme les garçons de son âge et ses cinq frères et sœurs, l'école primaire de son village. Mais à dix-huit ans, répondant à sa vocation religieuse, il entrait pour trois années de noviciat au monastère du Mont-Athos où il abandonne son patronyme pour prendre celui du monastère : « Lavriotis » et change son prénom de Vassilios (Basile) pour celui de Vlassios.
Lorsque la guerre éclate, il rentre à Athènes pour y achever ses études et entre en 1945 à la faculté de théologie. Il est ordonné prêtre en 1951 et devient alors le « père Vlassios ».
L'année suivante, ayant obtenu une bourse d'études pour la France, il entre au grand séminaire de la faculté catholique et arrive à Lyon quelques mois plus tard. Il prend en charge la Communauté orthodoxe grecque de la région. (archives municipales de Lyon, 3CP211)

Père Vlassios Lavriotis


Le 21 décembre 1952 se tint l'AG de L'Annonciation, qui se transforma à nouveau. Elle changea son siège social pour s'installer au 45, rue Dumoulin, à Lyon. La rue n'existe plus sous ce nom aujourd'hui, mais sous celui de rue du Père Chevrier, qui reste à ce jour le siège de l'association.

L'association changea également de nom, pour adopter celui de : Association Cultuelle Église Orthodoxe Grecque d'Orient - L'Annonciation de Notre-Dame.

Elle modifia aussi ses statuts. Son but exclusif, qui s'en interdit tout autre, est de servir ses membres selon leurs convictions religieuses et leurs besoins spirituels, intellectuels et moraux, suivant le rite orthodoxe grec d'Orient. L'Association a à sa disposition, avec ce même but exclusif de tout autre, l'édifice de l'église, « l'Annonciation de Notre-Dame » qui porte son nom et où elle assure l'exercice du culte selon le rite grec d'Orient. Cet édifice est sis à Lyon, à l'angle de la rue Dumoulin et de la rue de Colombier (art. 1).

Puis l'article 2 prévoit les modalités d'une fusion avec l' « Association Cultuelle Hellénique Orthodoxe » - qui a fondé et a fait construire l'édifice de l'église.

Toutes les utilisations autres que purement liées à l'exercice du culte orthodoxe sont proscrites, qu'elles soient laïques, culturelles ou associées à d'autres cultes, à moins d'une autorisation écrite du métropolite de Thyateira. Il est, de même, absolument interdit de procéder à toute cession perpétuelle ou provisoire ou aliénation, ou vente de l'édifice de l'église par l'Association, quels que soient, les vendeurs et les preneurs, de même qu'à toute location ou sous-location, à long terme ou à court terme.

Cette clause est encore en vigueur de nos jours, sous d'autres mots. L'église a été construite exclusivement avec l'argent des fidèles et ne peut en aucune façon être aliénée ou gagée.

Contrairement à l'association qui construisit l'église, ne peuvent être membres de L'Annonciation que les personnes d'origine grecque, de sexe masculin, majeures, et appartenant au rite orthodoxe d'Orient. Les femmes peuvent payer pour être adhérentes, mais ne seront pas membres ordinaires. La première inscription se fait avec l'avis compétent du curé.

La cotisation des membres est de cent francs mensuels pour les pauvres, et de deux cent francs pour les autres. Le salaire d'un ouvrier de 1952 était d'environ 4000 francs. L'évolution du pouvoir d'achat permet de constater que les 100 francs demandés aux pauvres en 1952 sont l'équivalent des 2 francs de 1921. Seules les personnes plus aisées sont davantage mises à contribution, mais en gardant une somme très raisonnable.

L'association, de par son statut cultuel, ne pouvait prétendre à d'autres revenus que ceux liés à l'exercice du culte et définis dans la loi de 1905. Mais elle s'autorisait le produit de tous concerts, représentations, fêtes, etc. donnés au profit de l’Église par des membres de l'Association (art. 4, g). Une personne pouvait organiser une manifestation, ne fût-elle qu'un prête-nom, et en reverser ensuite le montant : une manière subtile de concilier des intérêts divergents.

Le jour de l'AG reste fixé au dernier dimanche de décembre. Le quorum pour tenir une AG valide est de la moitié des membres plus un, inscrits et à jour de leur cotisation, à condition d'être membre depuis plus de 3 mois.

Les décisions sont envoyées au métropolite de Thyateira, pour approbation, qui les approuve au plus tard dans les quinze jours. Le conseil nouvellement élu se réunit dans les 8 jours et procède à l'élection du bureau. Son mandat est de deux ans. Comme précédemment, il cesse le 31 décembre de la seconde année de son exercice.

Les tarifs des sacrements ne sont plus mentionnés dans les statuts, vraisemblablement du fait de l'inflation rapide. Ils sont fixés par l'AG. Les droits de la Métropole se règlent directement entre la Métropole et le Conseil d'Administration (art. 15).

Nous apprendrons, dans le courrier adressé au préfet, que les statuts ont été rédigés par le métropolite Athénagoras de Thyateira, en grec, le 10 mars 1952, qu'ils ont été traduits en français et imposés à l'association.

Les autres articles sont semblables aux statuts adoptés lors de l'AG du 18 décembre 1932. Reste, par exemple, interdite l'image de l'Annonciation dans le sceau français de l'association.


Messieurs Balabanoglou, Xenakis, Tsorbadjis, Zagoridis, Costandinidi, Zavourloglou, Galacteros, Bacaloudis et Kyriakidis furent élus.

Monsieur Vassiloglou, qui faisait partie des fondateurs de l'église, ne s'était pas présenté aux élections.

Monsieur Balabanoglou fut nommé président. Il était le 7ème de L'Annonciation, et le 17ème depuis 1921.


Le courrier adressé au préfet en même temps que les nouveaux statuts explicite la situation de L'Annonciation par rapport à l'Association Cultuelle Hellénique Orthodoxe, propriétaire de l'église. Il précise également comment les nouveaux statuts ont été rédigés par un comité administratif provisoire de douze membres, instauré en juin 1952 et présidé par Monseigneur Athénagoras, Archevêque de Thyateira, avec pour délégué à Lyon monsieur le curé orthodoxe. Ce comité administratif provisoire avait pris la succession du comité de l'église, présidé par monsieur Constantin Bacaloudis, et qui était en fonctions depuis les élections de 1947.

Monsieur Bacaloudis avait donc été destitué six mois avant l'AG pour une raison qui n'apparaît pas. Il était remplacé par le métropolite, qui déléguait sa représentation à monsieur Costandinidi. Les fonctions du comité élu le 19 janvier 1947 avaient pris fin le 31 décembre 1948. Il resta néanmoins en poste quatre ans de plus, sans mandat valide. Mais la décision de remplacer ainsi son président ne semblait pas plus valide.

Malgré sa destitution, monsieur Bacaloudis fut réélu lors de l'AG, mais démissionna quelques jours plus tard. Le courrier adressé au préfet le 1er février 1953 faisait mention de sa démission, sans en évoquer les raisons. Il est probable qu'il y ait eu des désaccords entre les membres du conseil, et que monsieur Bacaloudis, mis en minorité, préféra céder sa place.

Monsieur Philippidis le remplaça.

Enfin, un règlement électoral, fut adressé au préfet. Il avait été rédigé le 4 décembre 1952, et était désormais applicable aux élections à venir. Ses clauses avaient la même valeur juridique que les clauses des statuts.

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