de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

lundi 6 février 2012

16- Docteur Ladias



Je me rappelle très bien du visage du Docteur Ladias, président de la communauté hellénique de Lyon durant de très nombreuses années. En revanche, je n'étais qu'un enfant et serait bien incapable de me prononcer sur son action. Je crois que tout le monde l'a respecté car je n'ai jamais entendu quelqu'un dire des choses négatives sur lui. Sa photo est encore dans le bureau, à droite quand on entre dans l'église. C'est sa signature qui est apposée sur les statuts originaux de l’association en tant que premier président. Il est resté président presque jusqu'à sa mort.

Une communauté vivante sait transmettre à ses enfants ses coutumes, ses passions mais aussi ses responsabilités. Les enfants qui héritent de tout cela ont à cœur de poursuivre les efforts de leurs parents. C'est la base de toutes les traditions. Une communauté n'est pas un musée et il est inévitable qu'elle se transforme sous l'action des particularismes de chacun, mais le cœur de l'héritage transmis est le fil rouge qui continue à unir chacun à travers les générations. Au même titre que tous les membres de la communauté, j'ai hérité de ça. Et le docteur Ladias fils en a hérité également de son père.

C'est cet héritage qui a poussé Junior (j'espère que le docteur Ladias fils prendra avec humour ce qualificatif) à se présenter aux élections du comité le 20 février dernier. Fort de l'estime que la communauté lui porte, il a été élu sans difficultés. Dans l'optique de modifier les statuts de la communauté pour le bénéfice de la métropole, le père Kakavelakis voulait cumuler la fonction de prêtre de la paroisse avec celle de président de la communauté. La culture et l'éducation de Junior lui ont rapidement fait prendre conscience que ce cumul des mandats pouvait être un obstacle au rôle du prêtre : un prêtre se doit d'avoir du recul afin d'écouter les problèmes de chacun, alors qu'un président doit pouvoir prendre des décisions qui ne font pas forcement plaisir à tout le monde.

Afin d'attirer l'attention sur cet état de fait, Junior a présenté sa candidature à la présidence du comité, en étant donc concurrent du père Nicolas. Il n'a pas été élu, mais il a gardé le regard critique d'un homme cultivé. Je ne le dit pas pour le flatter, car il m'a reproché d'avoir fait ce blog. Il estimait qu'un blog ressemblait à un déballage public des problèmes, alors que lui était partisan de la diplomatie. C'est pour tenir compte de son avis, mais aussi de celui de plusieurs personnes, que je n'ai rien écrit sur le blog la semaine dernière.

Conscient de son rôle d'élu, Junior a donc cosigné une lettre recommandée AR qui a été envoyée à monseigneur Emmanuel.

A la suite de la réunion du comité de dimanche dernier, une autre réunion a été fixée pour samedi 4 février. Réunion à laquelle devait assister l'évêque. L'ordre du jour était encore basé sur moi. Cet ordre du jour a fait réagir Junior qui estimait que la communauté avait des préoccupations importantes et qu'elle ne devait pas s'attarder sur des problèmes personnels. D'autant que j'avais annoncé que je suspendais le blog pour laisser le temps aux responsables de trouver des solutions aux problèmes de fond.

La réponse de l'évêque a été aussi expéditive que son enquête (voir le message 5) : il a décidé d'exclure du comité Junior au motif canonique qu'il est catholique. Pour l'instant, la décision n'est pas validée, car l'évêque veut la soumettre au comité qui gère les affaires de la Métropole.

En fait, cette décision n'est pas aussi expéditive qu'elle peut le laisser paraître. Elle tire sa source de l'assemblée générale du 20 février dernier. Nous avons déjà vu que, lors de cette assemblée, l'évêque avait voulu mettre au vote la modification des statuts, que cette modification avait été refusée au motif qu'elle n'était pas à l'ordre du jour, et que les modifications souhaitées n'étaient pas connues. Pour être plus précis, c'est Junior qui, ce jour-là, avait pris la parole pour faire remarquer à l'évêque que sa demande n'était pas opportune : tant du regard du droit français que de celui des relations humaines. Il avait fait remarquer que les modifications seraient mieux acceptées par la communauté si elles n'étaient pas adoptées dans la précipitation mais à la suite d'explications adéquates.

J'étais à l'assemblée générale pour répondre aux questions sur les travaux du presbytère. Je discutais avec le père Nicolas lorsque les faits ci-dessus se sont déroulés. Je me rappelle parfaitement celui-ci dire, furieux, qu'il n'oublierait pas ce que Junior venait de faire. Il le lui a fait sentir dès la première réunion, lorsque Junior a présenté sa candidature à la présidence : la prise de parole du père Nicolas a été particulièrement humiliante contre ce rival potentiel qui bénéficiait de toute l'aura de son père. Les courriers reproduits dans les liens ci-dessus n'ont été que le déclencheur d'un sort déjà scellé.

Monseigneur Emmanuel compte sans doute s'appuyer sur l'article 6, alinéa 4 des statuts qui dit que la qualité de membre se perd par opposition au pouvoir canonique de l'évêque. Il compte utiliser le fait que Junior est baptisé catholique. S'il est clair que cet article fait référence aux membres ordinaires, il est beaucoup plus contestable qu'il s'adresse aux membres élus du Conseil qui, eux, ne peuvent être investis pour les quatre ans de leur mandat qu'après que leur élection eut été validée par l'évêque (art. 9, §1).

Le Conseil actuel a bien été validé par l'évêque. Monseigneur Arsénios, lors de sa visite du 27 mars 2011 (Annonce Orthodoxe n°20, p5, §4), l'avait annoncé à la fin de la liturgie en félicitant le nouveau conseil. D'ailleurs, si le Conseil n'avait pas été validé, c'est en toute illégalité que l'argent de la communauté aurait été utilisé depuis un an. Junior a donc bien été validé dans ses fonctions par l'évêque, et ce pour les quatre ans de son mandat.

Le fait d'être baptisé catholique, comme c'est très souvent le cas dans les mariages mixtes de la diaspora, ne signifie pas que Junior soit opposé au pouvoir canonique de l'évêque. Il ne faut pas confondre pouvoir canonique de l'évêque (respect des règles de l’Église) et pouvoir temporel (membre du corps diplomatique du gouvernement grec). En écrivant un recommandé à l'évêque, Junior assume son rôle de membre élu qui se préoccupe des problèmes de la communauté. Il n'est en opposition avec aucune règle de l’Église. Au contraire : en prenant la responsabilité de faire face aux problèmes pour les régler, il en devient le meilleur défenseur.

Par ailleurs, en droit, on ne peut prendre une décision nouvelle que sur des faits nouveaux. L'évêque savait que Junior était catholique, tout comme il savait qu'un autre membre n'était pas baptisé dans le conseil précédent. Et pourtant il a validé son élection tout comme il avait validé le précédent conseil. Il n'y a eu aucun fait nouveau concernant Junior qui pourrait conduire l'évêque à prendre une décision nouvelle d'invalider son élection.

Bien évidemment, si l'évêque décide d'exclure Junior, il devra motiver sa décision et la notifier par écrit ; nous ne manquerons pas de la reproduire sur ce blog et d'y consacrer un article.

Si les statuts deviennent d'application stricte, ils disent à l'article 1 que la communauté se compose des orthodoxes grecs (ou d'origine) résidant dans le département du Rhône. Or, dimanche dernier, le père Nicolas a félicité des Géorgiens qui, en tant que membres de notre communauté, avaient fait des travaux bénévolement dans la salle paroissiale. L'article 1 des statuts prévoit que les Géorgiens ne peuvent pas être membre de l'association. S'ils n'en sont pas membres, ils ne peuvent pas y travailler bénévolement.

Ma position est de considérer que le rigorisme conduit à des dérives sectaires. Tout le monde est le bienvenu dans la communauté, car c'est l’Évangile qui nous unit suivant cette parole de Paul : Il n'y a plus ni Juif, ni Grec ; il n'y a plus ni esclave, ni homme libre, il n'y a plus l'homme et la femme ; car tous, vous n'êtes qu'un en Jésus Christ (Gal. 3, 28).

Il serait opportun que le père Nicolas prenne conscience qu'il ne peut pas prêcher tout et son contraire en l'espace de quelques jours : utiliser les statuts pour vouloir exclure quelqu'un quand ça l'arrange, et se moquer de ces mêmes statuts pour faire travailler des bénévoles quand il en a besoin.

Je terminerai par ces mots de Junior : L'essentiel, pour moi, c'est que notre communauté est ouverte à tous parce qu'elle est forte, forte de son passé, forte des liens de solidarité et de fraternité qui se sont créés entre nous au fil du temps. Et c'est cela qu'ils ne voient pas et ne savent pas : cette force qui nous lie entre nous et nous attache à la communauté.

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