Le rôle d'un prêtre étant, entre autres, de pousser à la réflexion théologique, nous avons la chance d'avoir, à Lyon, le père Nicolas Kakavelakis, qui est devenu expert en ce domaine. Le 15 juin dernier, nous recevions la communauté syrienne, qui accueillait dans notre église son évêque, Monseigneur Igniatios EL HOUCHI. Après qu'il eut appelé la police pour venir chasser de l'église une personne qui filmait l'office, le père Nicolas dit à la communauté syrienne présente : Dieu punit les fautes des parents sur les enfants !
Même s'il ne nous a pas habitués à beaucoup de discernement, dire cela à des Syriens, qui perdent leurs enfants tous les jours dans une guerre qui n'en finit pas, relevait non seulement d'un mauvais goût certain, mais également d'un manque de sens théologique profond. Ce sujet étant d'une grande importance et d'une grande sensibilité, je reviendrai dessus au travers de plusieurs messages. J'essaierai d'évoquer des épisodes tragiques que nous avons connus, et d'autres plus heureux, afin de replacer dans son contexte ce genre d'inepties propres aux manipulateurs. Car tout le monde aura bien compris que si Dieu punissait les enfants de ceux qui prennent des vidéos sans l'accord écrit d'un prêtre, il n'y aurait plus beaucoup d'enfants sur la planète. Le message d'aujourd'hui reviendra sur les aspects bibliques d'une telle déclaration.
L'Ancien Testament accréditerait, dans l'esprit d'un homme peu
instruit, l'idée que Dieu frappe les enfants dans son courroux.
De nos jours encore, nous avons facilement tendance à voir comme une malédiction divine la perte d'êtres chers qui touche des hommes politiques ou des militaires ayant beaucoup de sang sur les mains. Parmi des exemples fort nombreux, je retiendrai :
- Hafez el Assad qui a perdu son fils ainé, Bassel, dans un accident de voiture ;
- Saddam Hussein qui a perdu son fils ainé, Oudaï, atteint de plusieurs balles alors qu'il conduisait sa Porsche ;
- Pierre Gemayel qui a perdu son fils cadet, Béchir, assassiné neuf jours avant son entrée en fonction comme président du Liban ;
- Béchir Gemayel qui vit lui-même la voiture qui conduisait sa fille de 4 ans, Maya, exploser devant ses yeux alors qu'elle lui faisait un coucou de la main ;
- Amine Gemayel qui a perdu son fils, Pierre, assassiné, etc.
Le cinéma a repris cette conception populaire dans le magistral film de Coppola : Le Parrain. La trilogie se termine sur cet homme qui a semé la désolation durant sa vie, seul, le cœur brulé par le chagrin, hanté par les souvenirs des êtres chers qui lui ont été enlevés.
Mais s'il fallait considérer ces morts comme une règle inéluctable à laquelle les meurtriers ne pourraient se soustraire, il faudrait alors se demander pourquoi Georges Bush n'a jamais été frappé dans sa descendance, tout comme une myriade d'autres criminels.
Bien souvent, les hommes n'ont pas besoin de Dieu, ni même du diable, pour définir leurs actions et les mettre en pratique. Voir la conséquence d'une main divine sur des choses qui, non seulement n'ont rien de divin, mais souvent même n'ont rien d'humain non plus, est une position accommodante intellectuellement, mais totalement éloignée de la réalité. Car que faudrait-il alors penser des Saints Innocents, ces enfants en bas âge qu'Hérode fit exterminer pour se débarrasser du Messie dont les mages lui avaient annoncé la naissance (Matth. 2, 16-17) ? De quelle faute se faisaient-ils les victimes expiatoires ?
C'est pour ne pas assimiler Dieu aux malheurs qui arrivent trop souvent en son nom, lorsqu'ils ne lui sont pas directement attribués, que le Christ a dit : Il est impossible qu'il n'arrive pas des scandales, mais malheur à celui par qui ils arrivent (Lc. 17, 1) !
Lorsque le Christ rencontre l'aveugle de naissance, ses apôtres lui demandent si c'est lui ou ses parents qui ont péché pour qu'il soit né ainsi (Jn 9, 1-41). Cette question des disciples est un exemple d'une conception très répandue à l'époque : l'infirmité était vécue comme une malédiction, tout comme la prospérité un signe de bénédiction. Pour voir si un homme était aimé de Dieu, il suffisait donc de regarder s'il avait réussi dans la vie. Vision que les protestants ont largement reprise, notamment aux États-Unis, bien qu'elle soit largement contredite par de nombreux passages de l’Évangile.
Tout d'abord lorsque le Christ est tenté par le diable, dans le désert, ce dernier lui montra en un instant tous les royaumes de la terre, et lui dit : Je te donnerai toute cette puissance, et la gloire de ces royaumes ; car elle m'a été donnée, et je la donne à qui je veux (Lc 4, 6). Le Christ ne contestera pas cela et dira même à Pilate, dans les derniers moments de sa vie terrestre : Mon royaume n'est pas de ce monde (Jn 18, 36).
Le Christ revient également sur la richesse, fardeau qui dessèche le cœur, dans la parabole du mauvais riche et du juste Lazare (Lc 16, 19-31). Là, il inverse complètement l'échelle des repères de l'époque pour montrer que la richesse, non seulement n'est pas un signe de bénédiction divine, mais qu'elle peut être l'instrument dont se servent les forces démoniaques pour tromper les hommes.
Inversion des repères qui aboutira à sa souffrance et à sa mort sur la croix, lui qui a le pouvoir de vie sur toute chose. La souffrance et la mort n'étant plus des signes de malédiction, mais des marques ultimes de l'amour que l'homme est capable de donner, suivant cette parole : Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime (Jn 15, 13).
Pour revenir à la parabole de l'aveugle-né, la question des apôtres demandant si c'est lui ou ses parents qui ont péché, reste mystérieuse. Car, pour qu'il ait péché, alors qu'il est né aveugle, cela signifierait que son âme préexistait à son incarnation. Théorie reprise par Origène, mais que ses disciples rejetèrent, comme Grégoire de Nysse. Il est également possible de considérer que la réincarnation, idée véhiculée par les métissages orientaux dans le bassin méditerranéen, était largement admise à l'époque.
Tout d'abord lorsque le Christ est tenté par le diable, dans le désert, ce dernier lui montra en un instant tous les royaumes de la terre, et lui dit : Je te donnerai toute cette puissance, et la gloire de ces royaumes ; car elle m'a été donnée, et je la donne à qui je veux (Lc 4, 6). Le Christ ne contestera pas cela et dira même à Pilate, dans les derniers moments de sa vie terrestre : Mon royaume n'est pas de ce monde (Jn 18, 36).
Le Christ revient également sur la richesse, fardeau qui dessèche le cœur, dans la parabole du mauvais riche et du juste Lazare (Lc 16, 19-31). Là, il inverse complètement l'échelle des repères de l'époque pour montrer que la richesse, non seulement n'est pas un signe de bénédiction divine, mais qu'elle peut être l'instrument dont se servent les forces démoniaques pour tromper les hommes.
Inversion des repères qui aboutira à sa souffrance et à sa mort sur la croix, lui qui a le pouvoir de vie sur toute chose. La souffrance et la mort n'étant plus des signes de malédiction, mais des marques ultimes de l'amour que l'homme est capable de donner, suivant cette parole : Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime (Jn 15, 13).
Pour revenir à la parabole de l'aveugle-né, la question des apôtres demandant si c'est lui ou ses parents qui ont péché, reste mystérieuse. Car, pour qu'il ait péché, alors qu'il est né aveugle, cela signifierait que son âme préexistait à son incarnation. Théorie reprise par Origène, mais que ses disciples rejetèrent, comme Grégoire de Nysse. Il est également possible de considérer que la réincarnation, idée véhiculée par les métissages orientaux dans le bassin méditerranéen, était largement admise à l'époque.
Quoi qu'il en soit, le Christ affirme alors que ni lui ni ses parents n'ont péché, mais tout cela arrive pour que soit manifestée la gloire de Dieu. Puis il guérit cet aveugle.
La vérité est que bien fou serait celui qui voudrait expliquer la
sagesse de Dieu, et encore plus fou celui qui voudrait s'y substituer.Tout au plus sera-t-il susceptible d'entendre à son tour : Toutes ces choses m'ont été données, et je les donne à qui je veux.
Il n'y a donc pas besoin d’être grand clerc pour comprendre qu'il est extrêmement réducteur, voir simpliste, de considérer le malheur d'un enfant comme étant le fruit d'une faute. Le père Nicolas le saurait s'il avait suivi des cours de théologie. Mais comme il est écrit Bienheureux les pauvres en esprit (Matth. 5, 3), nous ne saurions lui en porter rigueur.
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