Il est déjà là ! Ces quelques mots semèrent la consternation chez ce brave vigile venu remplir ses obligations dominicales par un sacerdoce très particulier.
Tel un agent de sécurité de chez Carrefour qui voudrait contrôler le sac d'une cliente, il vint me trouver et me dit : Monsieur, veuillez me suivre s'il vous plaît. Ce à quoi je répondis simplement : Non.
Cela représentait-il un refus d’obtempérer ? Certainement. Mais, en l’occurrence, le refus était rendu légitime par l'illégitimité de la demande. Dimitri sortit un téléphone portable et se mit à filmer ce vigile agressif face à deux fidèles qui ne demandaient rien d'autre que de rester paisiblement au fond de l'église.
Le but du film était d'avoir une trace de son intervention, comme l'inspection du travail l'avait demandé, et d'établir une nouvelle fois qu'il ne portait pas sur lui les deux signes distinctifs de sa fonction qui sont obligatoires. L'enregistrement était également destiné à la police, dans le cas où il aurait outrepassé ses prérogatives et serait devenu violent ou provocateur.
Pris en défaut par cette vidéo venant de quelqu'un contre lequel il n'avait aucune consigne, le vigile le somma de l'effacer. Peut-être n'avait-il rencontré jusqu'à présent que des Grecs sans personnalité, mais ce n'était pas le cas de Dimitri, qui refusa de s'exécuter.
Vint alors la traditionnelle menace d'appeler la police. Nous l'avions tellement entendue, depuis quelques mois, que nous pensions aménager un coin pour pouvoir offrir aux patrouilles en visite un thé ou un café. Au moins par hospitalité, et peut-être aussi pour nous faire pardonner de les déranger inutilement.
Le perturbateur s'éloigna pour téléphoner et l'office retrouva un peu de calme.
Une demi-heure plus tard, la police n'était toujours pas là, cependant que Dimitri dut partir chercher quelqu'un à la gare. Dix à quinze minutes s'écoulèrent encore, avant que la porte ne s'ouvre pour laisser entrer une équipe de la BAC (Brigade Anti-Criminalité).
Tel un agent de sécurité de chez Carrefour qui voudrait contrôler le sac d'une cliente, il vint me trouver et me dit : Monsieur, veuillez me suivre s'il vous plaît. Ce à quoi je répondis simplement : Non.
Cela représentait-il un refus d’obtempérer ? Certainement. Mais, en l’occurrence, le refus était rendu légitime par l'illégitimité de la demande. Dimitri sortit un téléphone portable et se mit à filmer ce vigile agressif face à deux fidèles qui ne demandaient rien d'autre que de rester paisiblement au fond de l'église.
Le but du film était d'avoir une trace de son intervention, comme l'inspection du travail l'avait demandé, et d'établir une nouvelle fois qu'il ne portait pas sur lui les deux signes distinctifs de sa fonction qui sont obligatoires. L'enregistrement était également destiné à la police, dans le cas où il aurait outrepassé ses prérogatives et serait devenu violent ou provocateur.
Pris en défaut par cette vidéo venant de quelqu'un contre lequel il n'avait aucune consigne, le vigile le somma de l'effacer. Peut-être n'avait-il rencontré jusqu'à présent que des Grecs sans personnalité, mais ce n'était pas le cas de Dimitri, qui refusa de s'exécuter.
Vint alors la traditionnelle menace d'appeler la police. Nous l'avions tellement entendue, depuis quelques mois, que nous pensions aménager un coin pour pouvoir offrir aux patrouilles en visite un thé ou un café. Au moins par hospitalité, et peut-être aussi pour nous faire pardonner de les déranger inutilement.
Le perturbateur s'éloigna pour téléphoner et l'office retrouva un peu de calme.
Une demi-heure plus tard, la police n'était toujours pas là, cependant que Dimitri dut partir chercher quelqu'un à la gare. Dix à quinze minutes s'écoulèrent encore, avant que la porte ne s'ouvre pour laisser entrer une équipe de la BAC (Brigade Anti-Criminalité).
L'équipe vint me trouver et m'invita à sortir. Ce à quoi je répondis que je les suivrais dès la fin de l'office. Le vigile, visiblement aigri de son expérience de la semaine précédente, fit remarquer que ça finit vers 13 heures. La patrouille n'avait pas envie d'attendre deux heures à écouter le père Nicolas chanter, aussi décida-t-elle de presser le mouvement et renouvela sa demande. Mais ma réponse ne changea pas.
Un agent demanda mes papiers, mais je refusais de me soumettre à un contrôle d'identité dans une église. Je répondis à nouveau : Après l'office. Ils insistèrent en me menaçant de me sortir de force. Je refusais. La BAC n'aime pas que l'on joue à ça, mais ce n'était pas un jeu : seulement un respect du lieu, un respect de l'office, un respect des règles d'un état de droit qui n'autorisent pas les forces de l'ordre à user de n'importe quels moyens, sans les proportionner aux circonstances. Je sentais que cela allait dégénérer, mais il n'était pas question de céder sur ces principes.
Lorsque les Pussy Riot profanèrent la cathédrale du Christ Sauveur, à Moscou, le monde occidental prit leur défense au nom de la liberté d'expression, les présentant comme des artistes qui avaient simplement prié dans leur style musical propre : Sainte Vierge, chasse Poutine. Les plus hautes autorités françaises revendiquèrent leur droit d'expression artistique.
Mais une chose est de trouver un prétexte idiot pour s'en prendre à Vladimir Poutine, et autre chose est d'accepter de tels comportements chez soi. Et, en l'espèce, les autorités françaises étaient ici très loin de leurs leçons moralisatrices. Je ne chantais pas : Sainte vierge, chasse le métropolite, je ne me joignais pas au style musical du père Nicolas, plus proche de celui des Pussy Riot que du chant byzantin, je ne profanais pas l'autel par une agitation quelconque : j'étais simplement en silence à suivre un office au fond de l'église, sans déranger personne. Pourtant, je ne bénéficiais pas de la moindre indulgence qui avait été revendiquée par le monde entier comme un principe inaliénable.
La limite de la patience des agents de la BAC ayant été atteinte, l'un des agents m'étrangla pendant que les deux autres me tirèrent dehors.
J'ai alors compris pourquoi ce genre de prise tue régulièrement.
L'étranglement n'est pas simplement une prise destinée à bloquer la personne. Il est là pour empêcher de respirer, et la prise ne se relâche pas. Pendant que l'un d'eux me bloquait ainsi, les autres me prirent mes papiers pour les contrôler. Il n'y avait rien à faire, alors je m'attachais à la seule que je pouvais encore : ne pas me laisser mettre à terre et rester debout.
Ils avaient été prévenus par le vigile que j'étais un perturbateur, alors ils me fouillèrent pour trouver une preuve de cette perturbation, et pouvoir ainsi justifier de la violence dont ils usaient. Un peu comme les Américains qui allèrent détruire l'Irak sous prétexte de la présence d'armes de destruction massive, et ne se sont mis à chercher ces armes qu'après avoir tout détruit.
Il n'y avait pas plus d'éléments perturbateurs sur moi qu'il n'y avait d'armes de destruction massive en Irak. Mes poches étaient vides. Ils cherchèrent des clés de voiture, vraisemblablement pour la fouiller, mais je n'en avais pas. Ils cherchèrent un téléphone, avec lequel j'étais censé avoir pris des vidéos, mais je n'en avais pas.
L'un d'eux partit à l'écart avec mes papiers pour appeler le central et contrôler mon identité. Il revint annoncer le verdict qui était tombé : inconnu des services de police. Nous étions clairement dans une bavure, et je pense qu'ils commençaient à s'en apercevoir.
Là-dessus, Christos K., dans son habit noir qui l'enorgueillit, sortit féliciter ces braves défenseurs de l'ordre, et leur annonça que le Conseil de l'église avait décidé de mon exclusion à cause du trouble que je créais. Quel trouble ? Quel Conseil ? La BAC n'était pas là pour en juger. Le monsieur en noir ayant parlé, il m'était interdit de retourner dans l'église.
Pourtant, malgré la tension, la conversation put s'installer doucement. Nous n'étions plus que dans des petites menaces de routine :
- S'il n'y avait pas eu de monde, on n'aurait pas été aussi gentils ;
- Ce n'est pas grave si tu n'as rien sur toi, t'inquiète pas, si on cherche, on va te trouver des choses ;
- Si tu y retournes, on t'embarque et on te met en garde à vue ;
...
Il faut dire que la BAC est à la police ce que l'amputation est à la médecine.
Il faut dire que la BAC est à la police ce que l'amputation est à la médecine.
Coluche disait : Plus il y a des flics autour de moi, moins je me sens en sécurité ! Qu'entendaient-ils par " une intervention plus musclée " ? Qu'auraient-ils trouvé s'ils avaient mieux cherché ? La garde à vue n'est-elle pas là pour faciliter une enquête dans le cadre d'un délit en cours ou en préparation ? De quel délit ou de quelle infraction parlions-nous ? Est-il aussi facile, en France, de faire accuser quelqu'un sur des preuves fabriquées, sans motif, quitte à le frapper, pour le simple fait qu'il assiste à un office religieux ?
Il n'y avait pas le gentil flic et le méchant flic, mais trois méchants
qui ne faisaient même pas semblant de respecter les formes. Je décidais de remettre ce genre de réflexion à plus tard et me concentrais sur l'instant : rester calme et posé pour que mon discours ou mes actes ne se fassent pas l'écho de toute leur provocation.
C'est ainsi que nous avons commencé à parler de la procédure en cours qui concernait les faux documents et la falsification de nos statuts d'association, enquête dans laquelle j'avais été entendu quelques jours plus tôt en tant que témoin. Et aussi de l'histoire de mœurs qui avait impliqué une jeune étudiante chypriote. Et encore de celle des violences volontaires pour lesquelles l'homme en noir qu'ils avaient vu quelques minutes plus tôt était poursuivi. Etc.
Peut-être n'étais-je pas l'agresseur, mais l'agressé ? Le témoin qui ne perturbait que le perturbateur.
Ils auraient aimé que je leur dise que j'allais partir, pour pouvoir faire de même, mais je refusais là encore d’obtempérer. Je dis clairement que dès qu'ils seraient partis, j'allais retourner dans l'église, et la seule alternative était qu'ils m'embarquent.
L'un d'eux, sans doute plus philosophe que les autres, me fit remarquer que je ferais mieux de planter ma croix dans mon jardin, plutôt que de venir ici pour les emmerder. Comme ça, je l'aurais chez moi et je serais tranquille. S'il avait été disposé à entendre quelques réflexions de sagesse, je lui aurais dit qu'il était préférable de la planter dans son cœur plutôt que dans son jardin, car ainsi elle ne nous quitterait jamais. Planter une croix quelque part n'est pas l'expression d'un repli sur soi, signifiant que l'on doive ensuite fermer les yeux sur les injustices auxquelles nous sommes confrontés. Fussent-elles le fait d'un prêtre.
Le policier philosophe prit mon stylo, visa la bouche d’égout à l'opposé du croisement où nous étions, et l'y lança. Tel un basketteur marquant un panier à trois points, il réussit son lancer du premier coup. Il n'y avait pas grand chose d'autre à dire que : Bien tiré ! C'était un authentique stylo publicitaire philtaxi@live.fr - 0610622528 qui partit ainsi bêtement dans les entrailles de la cité.
Les choses changèrent vraiment lorsqu'arriva Stélios. Il stoppa son 4x4 au milieu du croisement, interpella les agents de la BAC et leur dit : Qu'est-ce que vous faites, là ? C'est un lieu ouvert à tous, ici ! Ne bougez pas, je gare ma voiture et j'arrive !
L'un d'eux s'éloigna pour téléphoner au central et prendre des consignes. Lorsqu'il revint, il dit : Le commandant arrive !
Peut-être n'étais-je pas l'agresseur, mais l'agressé ? Le témoin qui ne perturbait que le perturbateur.
Ils auraient aimé que je leur dise que j'allais partir, pour pouvoir faire de même, mais je refusais là encore d’obtempérer. Je dis clairement que dès qu'ils seraient partis, j'allais retourner dans l'église, et la seule alternative était qu'ils m'embarquent.
L'un d'eux, sans doute plus philosophe que les autres, me fit remarquer que je ferais mieux de planter ma croix dans mon jardin, plutôt que de venir ici pour les emmerder. Comme ça, je l'aurais chez moi et je serais tranquille. S'il avait été disposé à entendre quelques réflexions de sagesse, je lui aurais dit qu'il était préférable de la planter dans son cœur plutôt que dans son jardin, car ainsi elle ne nous quitterait jamais. Planter une croix quelque part n'est pas l'expression d'un repli sur soi, signifiant que l'on doive ensuite fermer les yeux sur les injustices auxquelles nous sommes confrontés. Fussent-elles le fait d'un prêtre.
Le policier philosophe prit mon stylo, visa la bouche d’égout à l'opposé du croisement où nous étions, et l'y lança. Tel un basketteur marquant un panier à trois points, il réussit son lancer du premier coup. Il n'y avait pas grand chose d'autre à dire que : Bien tiré ! C'était un authentique stylo publicitaire philtaxi@live.fr - 0610622528 qui partit ainsi bêtement dans les entrailles de la cité.
Les choses changèrent vraiment lorsqu'arriva Stélios. Il stoppa son 4x4 au milieu du croisement, interpella les agents de la BAC et leur dit : Qu'est-ce que vous faites, là ? C'est un lieu ouvert à tous, ici ! Ne bougez pas, je gare ma voiture et j'arrive !
La BAC n'apprécia pas l'annonce de Stélios : ils avaient
assez perdu de temps et n'avaient pas envie de passer leur dimanche dominical à
l'église. Ils partirent rapidement pour ne pas avoir à écouter de
nouvelles doléances, non sans m'avoir menacé de revenir si je retournais
dans l'église.
Stélios revint et me demanda où était passée la patrouille. Voyant qu'elle ne l'avait pas attendu, il me dit, avec l'autorité que lui confère sa personnalité et son âge : Viens ! Et nous nous dirigeâmes vers l'église.
Nous
voyant revenir, le vigile se plaça devant le portail d'accès pour nous
empêcher d'entrer. Mais il n'a pas le droit de toucher quelqu'un et il
fut rapidement contourné. Il se repositionna devant la porte d'entrée et
bloqua l'accès à tous les fidèles qui arrivaient en faisant rempart de
son corps.
Stélios lui dit : Toi, tu es trop petit pour empêcher quelqu'un d'entrer ici.
Ce qui vexa notre zélé protecteur, qui ne comprenait pas que Stélios
parlait de la dimension métaphysique du lieu et de sa dimension
universelle.
Se voyant perdre le contrôle de la situation, il nous menaça à nouveau d'appeler la police. La menace n'avait pas plus d'effet que précédemment, aussi prit-il
son téléphone et lança-t-il une alerte au service d'urgence de la police :
- Ils ont
forcé le passage et créent du trouble.
- On vous renvoie une équipe.
Il
était le narrateur de son histoire, qu'il enjoliva sous le jour qui
l'arrangeait. Il n'y avait eu aucun passage forcé et aucun trouble, si ce
n'est celui que créait ce pauvre homme par des entraves à la libre
circulation des biens et des personnes.
Il
ne restait plus qu'à attendre la BAC, qui revint en moins d'une minute.
Ils connaissaient les lieux. Les présentations étaient déjà faites.
Tout cela conduisit à détendre l'atmosphère plus rapidement et à engager
le dialogue qu'ils avaient voulu fuir en partant sans attendre Stélios.
Sur
ces entrefaites arriva une patrouille de police. Ces agents en uniforme avaient été
prévenus par leur hiérarchie d'un risque de trouble à l'ordre public,
et avaient pour mission de faire des rondes entre 10 heures et midi,
suite à une main courante qui avait été déposée au commissariat dans la
semaine, ainsi qu'un signalement qui venait de l'Hôtel de Police.
Stélios
expliqua que c'était lui qui avait déposé cette main courante. Qu'elle
était destinée à me protéger, parce que j'avais déjà été victime de
violences. Et que le trouble à l'ordre public venait du vigile qui
exerçait le blocage d'un lieu sans mandat valide. Stélios expliqua que j'étais la victime et non la cause.
L'équipe
de la BAC eut un peu de mal à assimiler ce renversement de situation,
mais les recoupements qu'ils firent donnèrent raison à Stélios, qui fut
ce jour-là mon meilleur avocat.
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