Les livres de Goscinny sont d'une grande richesse. Ils peuvent être compris par tous les âges, à des niveaux d'humour différents suivant notre culture. Dans Les lauriers de César, je n'avais jamais compris ce qu'il y avait de drôle au fait que l'avocat de la défense et le procureur axent leur plaidoirie sur ces mots : Carthago delenda est.
Un
général russe reprenait
cette phrase dans un journal pour faire comprendre la politique militaire
des États-Unis. Et l'auteur expliquait que Caton l'Ancien, mort
en 149 avant J.C., commençait chacun de ses discours au Sénat de Rome par ces
mots : Carthage doit être détruite ! Il les terminait de la même façon,
même lorsque son discours n'avait absolument rien à voir avec la guerre qu'il
voulait lancer. Finalement, peu après la mort de Caton, les romains
assiégèrent Carthage et la détruisirent.
Il
ressortait deux choses de la compréhension de cette citation :
-
l'avocat d'Astérix ne visait pas à défendre ce dernier, ni le procureur à
remplir sa mission, mais les deux avaient pour but la promotion de leur propre
égo ;
-
elle est synonyme de pugnacité. Elle représente l’inéluctabilité d'une chose
que les évolutions de la vie ne sauront empêcher.
Lorsque
j'écrivais les messages
relatifs aux procédures dans lesquelles la communauté hellénique de Lyon
s'enfonçait, j'évoquais des
faits de faux et usage de faux documents. Ces faux documents avaient servi
à modifier nos statuts associatifs de manière frauduleuse au bénéfice de deux
personnes : le père Nicolas Kakavelakis, qui pouvait désormais puiser dans la
caisse de la communauté, ainsi que le métropolite Emmanuel Adamakis, qui
prenait le contrôle des statuts et le pouvoir de les modifier.
Suite
à ces faits, des élus décidaient de prendre conseil auprès d'un avocat
spécialisé en droit pénal. C'était il y a un an et demi, en mai 2013. L'avocat
confirmait l'analyse et acceptait de les représenter. Sur la base des documents
en sa possession, il rédigea un mémoire qu'il transmit aux services du parquet
de Lyon afin de saisir le Procureur d'une plainte. Elle fut enregistrée le 5
décembre 2013.
La
plainte, déposée contre X, visait toutes personnes ayant contribué à la
rédaction d'un faux procès verbal d'assemblée générale, ainsi que les personnes
ayant utilisé ce faux pour déposer de nouveaux statuts en préfecture. Étaient
visés le possesseur du tampon de la Communauté, également connu sous le nom de
père Nicolas Kakavelakis, ainsi que les autres signataires de ces statuts
modifiés : Christos K., Pénélope D. et Vassilia S., sans que cette liste ne
soit limitative.
Était
également visé monsieur Adamakis, connu, lorsqu'il n'est pas en
vacances, sous le pseudonyme scénique de Monseigneur Emmanuel,
métropolite de France. Celui-ci, bénéficiant de l'immunité diplomatique de
par son poste à l'ambassade de Grèce, a très peu de chances d'être inquiété,
même s'il a couvert de son autorité les dérives de son prêtre. Il fut en effet
informé en recommandé AR de l'existence de ces faux et décida de cautionner
l'exclusion des élus qui l'avaient informé.
Les
faits concernés remontant au 20 février 2011, et la prescription pénale étant
de trois ans pour de tels faits, la plainte est donc recevable puisque déposée
2 mois avant le délai de prescription. L'engagement d'une procédure suspend la
prescription.
Une
plainte Parquet relevant de la seule appréciation du Procureur, et celui de
Lyon recevant 400 000 plaintes par an, il était à craindre que cette plainte ne
soit classée sans suites avant même d'être instruite. Les plaignants, sans
nouvelle depuis 9 mois, croyaient que tel fut le funeste sort qui leur avait
été réservé.
La
Loi prévoit que, sans nouvelles d'une plainte durant plus de 3 mois, il est
possible de saisir le juge d'instruction par une constitution de partie civile.
Cette nouvelle plainte est rédigée de façon quasi identique à celle adressée au
Parquet, mais le juge d'instruction ne peut pas la classer. Il demande une
caution, proportionnelle aux revenus des plaignants, qui leur sera rendue si la
justice leur donne raison, puis il engage l'instruction.
Les
élus se préparaient à faire ainsi évoluer leur plainte lorsqu'ils reçurent une
convocation au commissariat du 7ème arrondissement. La convocation visait à
enregistrer la plainte, ce qui signifie, dans le déroulement de la procédure,
que le Procureur l'a reçue, lui a donné un numéro d'enregistrement, l'a
transmise à l'un de ses services qui a chargé la police d'une enquête
préliminaire : le premier acte de l'instruction étant d'entendre les plaignants
pour qu'ils confirment leur plainte.
Les
élus se sont rendus à cette convocation entre le 2 septembre et le 27 novembre
derniers, suivant leurs disponibilités.
Selon
toute vraisemblance, Monsieur Kakavelakis a du être entendu début janvier, mais
j'ignore pour le moment ce qu'il est ressorti de son audition. Je ne manquerai
pas de vous donner des nouvelles lorsque que j'en aurai... Il est probable que
d'autre personnes seront également entendues dans cette affaire qui relève du
tribunal correctionnel.
Lorsque
l'enquête préliminaire sera terminée, le Procureur garde la possibilité de
classer la plainte sans suite, tout comme les élus plaignants gardent la
possibilité de saisir le juge d'instruction si tel est le cas. Le temps qui
passe n'est pas un problème, car certaines choses sont inéluctables.
Carthago
delenda est !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire