La question des doubles standards est souvent évoquée lorsque des pays souhaitent s'arroger les mêmes droits que les Américains. Vladimir Poutine a évoqué ce problème récurent de la politique internationale dans son discours devant les deux chambres du Parlement, au Kremlin, lorsqu'il a décidé de valider le référendum de Crimée et d'accepter sa demande de rattachement à la Russie.
Dans ce discours solennel, Vladimir Poutine relève plusieurs points de droit international. D'abord la convention de l'ONU qui fixe le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Il cite ensuite la décision de la Cour Internationale de Justice des Nations Unies, qui a validé la déclaration d'indépendance du Kosovo. Elle a fait le commentaire suivant dans sa décision du
22 juillet 2010 : « Aucune interdiction générale ne peut être
déduite de la pratique du Conseil de sécurité en ce qui concerne les
déclarations d’indépendance ». Et encore : « Le droit international
général ne contient aucune interdiction contre les déclarations d’indépendance. » Cette déclaration d'indépendance s'est d'ailleurs faite sans qu'il y ait eu de référendum et alors que la constitution Serbe empêchait une telle sécession. Il rappelait également que l'exposé écrit des États Unis d'Amérique du 17 avril 2009, dans le cadre des audiences sur le Kosovo, citait : « Les déclarations d’indépendance peuvent – et c’est
souvent le cas – violer la législation nationale. Toutefois, cela n’en fait pas
des violations du droit international. »
En Occident, ses détracteurs continuent à affirmer que le référendum de Crimée n'était pas conforme au droit international, mais aucun ne dit en quoi les arguments avancés par monsieur Poutine seraient erronés.
Car si les Russes ou les Chinois décident d'appliquer les règles de fonctionnement international des Américains et des Européens, alors ils peuvent déclarer des guerres préventives n'importe où dans le monde sous prétexte de la menace pesant sur leurs ressortissants, de lutte contre le terrorisme, ou de soutien à une action humanitaire. Ils peuvent décréter des sanctions financières unilatérales contre un pays qui ne respecteraient pas des règles qu'ils auraient fixées. Ils peuvent bombarder des pays entiers pour punir leurs dirigeants, comme nous l'avons fait en Lybie...
Et effectivement, monsieur Poutine serait fort tenté d'intervenir en Ukraine pour protéger ses ressortissants des menaces que lui font courir les nouvelles autorités. Car si les Occidentaux affirment que le référendum en Crimée n'est pas conforme à la constitution Ukrainienne, le changement de pouvoir consécutif au coup d'état de Maïdan n'est pas davantage conforme à cette même constitution, ni même le recours à l'armée contre la population de l'Est.
Quelle légitimité avons-nous à contester les positions russes après l'exemple que nous avons donné un peu partout sur la planète ? Aucune, si ce n'est celle de Jean de la Fontaine : La raison du plus fort est toujours la meilleure. Le problème étant pour nous, actuellement, que les Russes sont ici les plus forts et qu'ils sont dans leur zone d'influence.
Je n'aime pas le concept de zone d'influence que développait Carl Schmitt, car ce principe altère la notion de liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes. Si les Écossais votaient leur indépendance, lors du référendum du 18 septembre prochain, leur contesterions-nous la possibilité d'user de leur souveraineté pour se rattacher à l'Union Douanière, ou à la Fédération de Russie ? Ce droit que revendique l’Écosse, et tous les peuples de la Terre derrière elle, devrait-il être refusé à la Crimée où à d'autres ? Et si l'Europe refuse à l’Écosse le droit de ne plus dépendre de l'Europe, devrions-nous nous étonner que la Russie ne veuille pas que l'Ukraine adhère à l'Europe ?
Pour ma part, je considère que les peuples sont souverains. Si les Ukrainiens décidaient de se rattacher à l'Europe, ils devraient pouvoir le faire. Et si les Écossais, ou les Transnistriens, ou les Abkhazes décidaient de se rattacher à la Fédération de Russie, ils devraient également pouvoir le faire.
Comme le disait récemment Henri Kissinger à propos de la politique des Occidentaux en Ukraine, la diabolisation de monsieur Poutine n'est pas de la politique, mais un alibi qui cache leur incompétence. Je ne doute pas que si monsieur Kissinger trouvait intelligente l'idée de Hollande, qui souhaite renforcer les sanctions contre la Russie, il nous en aurait fait part !
Même si nous savons, grâce à madame Ashton, que la nouvelle coalition au pouvoir à Kiev est l'instigatrice de tous les morts de la place Maïdan, ce nouveau pouvoir n'en accuse pas moins monsieur Ianoukovitch d'avoir fait tirer sur les manifestants. Ils ont lancé un mandat d'arrêt international contre lui, estimant que la place de quelqu'un qui ordonne de tirer contre le peuple est en prison.
C'est pourtant ce même pouvoir qui a demandé aux forces spéciales ukrainiennes de donner l'assaut sur les bâtiments administratifs occupés dans l'Est, avec ordre de tirer sur les manifestants. Ces forces ont refusé d'exécuter l'ordre reçu, et l'on a vu la police anti-émeute se ranger du côté des manifestants, que ce soit à Donetsk ou à Lougansk. Si bien qu'il a fallu que Kiev mobilise les factions fascistes de Praviy Sektor pour les envoyer réprimer les protestations.
Les menaces sur la population russe sont donc bien plus réelles que celles sur la population américaine lorsque Powell brandissait ses petites fioles devant l'ONU. Si donc les Américains, sur des déclarations mensongères et fantaisistes, ont pu envahir et détruire l'Irak, les Russes n'auraient-ils pas plus de légitimité à intervenir pour protéger leurs ressortissants en Ukraine ?
Finalement, tout cela n'est que beaucoup d'hypocrisie, comme le rappelait monsieur Lavrov. Nous appelons libérateurs les révolutionnaires de Maïdan, et nous appelons terroristes les révolutionnaires de l'Est, alors que les deux procèdent des mêmes comportements et des mêmes motivations.
Au-delà des formulations linguistiques reste donc les accusations d'ingérence étrangère, puisque Washington accuse Moscou de soutenir les insurgés de l'Est. C'était pourtant la conversation de madame Nuland qui établissait que Washington soutenait les insurgés du Maïdan. Les médias se sont même mis à parler d'une visite secrète du directeur de la CIA, John Brennan, à Kiev, deux jours avant que l'armée ne commence son opération dans l'Est. Nous pouvions supposer que cette information était à ranger au compte des rumeurs propres à la désinformation, d'autant que Washington la démentait, jusqu'à ce que Sergueï Lavrov demande officiellement des comptes et que Washington confirme cette visite.
Oleg Tsarev, candidat aux prochaines élections présidentielles d'Ukraine, a même affirmé que tout un étage du bâtiment des services de sécurité de l'Ukraine était mis à disposition des agents de renseignement US.
Contrairement à l'ingérence effective des USA, pour laquelle nous disposons de nombreuses preuves, l'intervention Russe n'est établie par aucun document tangible. Je ne suis pas dupe, et je me doute bien que les Russes ne restent pas à attendre les bras croisés à suivre l'évolution des événements sur CNN. Mais c'est l'ingérence même des Américains qui légitime les actions russes. Ce qui permet à Poutine d'être encore plus populaire auprès de son peuple.
Là où le nouveau pouvoir de Kiev se différencie sans doute le plus des autorités russes reste sur l'usage du nationalisme. Vladimir Poutine utilise le nationalisme comme moyen de cohésion de son pays, alors que Tourtchinov l'utilise comme moyen de division. Car comment considérer autrement la volonté d'un homme qui annonce l'envoie de l'armée pour réprimer sa population, lui qui a usurpé le poste qu'il occupe et le titre qu'il s'arroge ?
Étant à l'origine des troubles de Maïdan
et des répressions de l'Est,
Tourtchinov ne peut donc être vu que comme l'initiateur d'une guerre civile. Car il faut bien parler de guerre civile quand les forces de police se rangent du côté des manifestants, comme une partie de l'armée, et qu'une autre partie de la même armée retourne ses armes contre la population qu'elle est censée défendre.
Le réveil sera dur pour ceux qui savent que la raison du plus fort est toujours la meilleure, mais qui oublient qu'ils ne sont ici que le petit agneau de l'histoire.
Au-delà des formulations linguistiques reste donc les accusations d'ingérence étrangère, puisque Washington accuse Moscou de soutenir les insurgés de l'Est. C'était pourtant la conversation de madame Nuland qui établissait que Washington soutenait les insurgés du Maïdan. Les médias se sont même mis à parler d'une visite secrète du directeur de la CIA, John Brennan, à Kiev, deux jours avant que l'armée ne commence son opération dans l'Est. Nous pouvions supposer que cette information était à ranger au compte des rumeurs propres à la désinformation, d'autant que Washington la démentait, jusqu'à ce que Sergueï Lavrov demande officiellement des comptes et que Washington confirme cette visite.
Oleg Tsarev, candidat aux prochaines élections présidentielles d'Ukraine, a même affirmé que tout un étage du bâtiment des services de sécurité de l'Ukraine était mis à disposition des agents de renseignement US.
Contrairement à l'ingérence effective des USA, pour laquelle nous disposons de nombreuses preuves, l'intervention Russe n'est établie par aucun document tangible. Je ne suis pas dupe, et je me doute bien que les Russes ne restent pas à attendre les bras croisés à suivre l'évolution des événements sur CNN. Mais c'est l'ingérence même des Américains qui légitime les actions russes. Ce qui permet à Poutine d'être encore plus populaire auprès de son peuple.
Là où le nouveau pouvoir de Kiev se différencie sans doute le plus des autorités russes reste sur l'usage du nationalisme. Vladimir Poutine utilise le nationalisme comme moyen de cohésion de son pays, alors que Tourtchinov l'utilise comme moyen de division. Car comment considérer autrement la volonté d'un homme qui annonce l'envoie de l'armée pour réprimer sa population, lui qui a usurpé le poste qu'il occupe et le titre qu'il s'arroge ?
Étant à l'origine des troubles de Maïdan
et des répressions de l'Est,
Tourtchinov ne peut donc être vu que comme l'initiateur d'une guerre civile. Car il faut bien parler de guerre civile quand les forces de police se rangent du côté des manifestants, comme une partie de l'armée, et qu'une autre partie de la même armée retourne ses armes contre la population qu'elle est censée défendre.
Le réveil sera dur pour ceux qui savent que la raison du plus fort est toujours la meilleure, mais qui oublient qu'ils ne sont ici que le petit agneau de l'histoire.
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