de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 7 avril 2012

37- Révolutions

Si l'on comprend que les hommes politiques essayent de se faire bien voir des courants religieux, qui regroupent énormément d'électeurs, on comprend moins que les religieux essayent de s'accaparer la politique pour asseoir leur influence. En effet, au moins dans le christianisme, la foi s'est transmise par l'exemple que donnaient les chrétiens, de la même façon que les bouddhistes le font : sans prosélytisme. Je ne parle pas des catholiques romains qui, au regard de l'Orthodoxie, se sont coupés de l’Église et de l'Esprit qui la vivifie. Leurs actions ont poussé à d'innombrables conflits et à des phrases mémorables telle : Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens. Je ne sais pas s'il y a eu beaucoup d'hommes aussi loin de Dieu que l'abbé qui prononça cette phrase. En tout cas, il ne devait pas avoir lu cette parole : Ce que vous avez fait au plus petit d'entre mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait. (Matth. 25, 40)

Beaucoup plus proche de nous, Benoît XVI a récemment rendu hommage à monseigneur Stepinac, lors de son voyage en Croatie. Alors que le père Placide Deseille était encore moine cistercien et qu'il célébrait avec le rituel byzantin, il avait un ossement de monseigneur Stepinac cousu dans l'antimansion (nappe consacrée posée sur l'autel sur laquelle on célèbre la liturgie). Quand il a étudié la vie de monseigneur Stepinac et qu'il s'est aperçu de tout le sang qu'il avait sur les mains, notamment de tous les orthodoxes serbes qui avaient fini en camps de concentration et étaient morts à cause de lui, il a brûlé cet ossement, estimant que sa place était dans les flammes, et non sur l'autel. Rendre hommage à cet évêque qui a été béatifié par les catholiques est aussi aberrant que s'il décidait de canoniser Marc Dutroux. Et le présenter comme le défenseur des orthodoxes et des opprimés relève de l'indécence. Je renvoie, pour plus de détails, vers le livre d'Hervé Laurière, Assassins au nom de Dieu, éd. La Vigie, Paris, 1951, réédité par L'Âge d'Homme, Lausanne, 1993 avec une photo de Stepinac en couverture.

D'une façon générale, tous les nationalismes religieux se ressemblent : le sionisme qui axe son espérance dans le matériel et le temporel, l'islamisme qui veut imposer la charia à tous, le catholicisme romain dont le Vatican reste le dernier vestige d'un état étendu et autoritaire, et dont les nonces apostoliques, plus grand corps diplomatique au monde, intriguent plus à asseoir leur pouvoir qu'à propager les valeurs de l’Évangile...

Tous n'ont pas la même vision de Dieu, donc ne justifient pas leur politique de la même façon, mais, pour ce qui est des chrétiens, ils oublient parfois que le Christ aurait pu avoir tous les royaumes de la terre lorsque Satan l'a tenté dans le désert (Matth. 4, 5-7). Mais il ne les a pas pris. Le serviteur n'est pas plus grand que le maître (Jn 15, 20), et le chrétien ne peut pas prendre ce que le Christ a laissé. Il doit s'attacher à la seule chose importante : n'adorer que Dieu et ne servir que lui, dans la vision du Royaume qu'il nous a préparé. 

Ces derniers jours, avec la tuerie de Toulouse, la question du danger de l'islamisme a été récurrente. J'ai vu Sarkozy, Guéant et Juppé inviter à ne pas faire d'amalgame, mais se positionner radicalement contre l'extrémisme musulman. Quand Nicolas Sarkozy s'est battu pour faire libérer les infirmières bulgares, il y a un homme qui l'en a empêché : le président de la cour d'appel de Tripoli, qui a confirmé par deux fois la peine de mort des infirmières. Ce président était Moustafa Abdel Jalil. Or celui qui nous a alors été présenté comme un intégriste et l'un des pires ennemis de l'Occident est précisément le chef du Conseil National de Transition de Libye, que le même Nicolas Sarkozy a aidé à prendre le pouvoir en envoyant notre porte-avion et nos soldats bombarder la Libye.

Le gentil Abdel Jalil, que l'on mettait à la place du méchant Kadafi après avoir ravagé son pays et créé une guerre civile qui se poursuit, a proclamé, lors de sa toute première prise de parole de l'après-Kadafi, que ce serait désormais la charia qui serait en vigueur en Libye ; la même charia que l'on dénonce en Iran depuis Khomeini. Le gentil Abdel Jalil qui se plaignait que le méchant Kadafi le bombardait avec ses avions pour demander à l'ONU d'intervenir, prend maintenant les mêmes avions pour bombarder les tribus du sud qui lui résistent ! Le drame de Toulouse nous a montré comment l'islamisme peut frapper chez nous ? Alors que l'on se rappelle que c'est nous qui le mettons en place.

Cela nous ramène directement à ce qui se passe en Syrie. Nous voyons le Patriarche Ignace IV accuser l'Occident et notamment la France de vouloir vider le pays de ses chrétiens. Nous le voyons s'opposer à toute intervention étrangère dans son pays. Et pourtant il n'est pas écouté. L'ambassadeur français à Damas a critiqué la politique d'Alain Juppé, accusé de ne pas avoir tenu compte des rapports qu'il lui envoyait pour privilégier un interventionnisme injustifié, ce qui aurait conduit à l'arrestation de soldats français en territoire syrien

Avec un régime autoritaire, Bachar El Assad, président de la Syrie, tient son pays où les minorités sont respectées. Lui-même étant issu de la minorité Alaouite. C'est cette protection et cet équilibre dans lequel tous les courants peuvent exister qui a poussé le Patriarche Ignace IV à condamner l'interventionnisme de l'Otan. Tous les pays ont peur de la paix que les Américains ont apportée en Irak et en Afghanistan. Et l'exemple qui leur est donné par la Libye ne fait que renforcer cette crainte. Les Syriens sont exsangues financièrement, comme les journaux le disent parfois ? Ils le seront beaucoup plus si leur pays est détruit par les bombes et qu'ils se retrouvent sous le joug des salafistes et autres sunnites radicaux.

Moubarak était corrompu, mais la révolution égyptienne a-t-elle changé quelque chose ? L'armée est pour l'instant toujours au pouvoir, les minorités qui ont fait la révolution viennent de se retirer de la commission constituante de la nouvelle constitution, au motif qu'elle est noyautée par les islamistes et qu'il n'y a aucun espoir pour que cette future constitution représente vraiment le peuple égyptien dans sa diversité. Les musulmans tuent les chrétiens, comme sous Moubarak. Vingt-quatre chrétiens sont morts, tués par l'armée, lors d'une manifestation où ils dénonçaient les exactions de plus en plus nombreuses contre eux.

Malgré ce qui se passait, ce sont les Américains qui ont aidé Moubarak à se maintenir en place, notamment avec une aide financière extrêmement importante depuis que l’Égypte avait signé la paix avec Israël. Ils gardaient à l'esprit ce diction du Moyen-Orient sans lequel on ne peut comprendre aucun des conflits de ces quarante dernières années : " Il n'y a pas de paix sans l’Égypte, et pas de guerre sans la Syrie. " 

Si Dieu voulait que la croyance en lui soit imposée à tout le monde, il ne fait aucun doute qu'il serait assez fort pour le faire lui-même, puisqu'il est Dieu. Si donc il ne le fait pas, c'est qu'il ne le veut pas. Doit-on se mettre à sa place pour imposer la croyance en lui et lui faire comprendre qu'il a tort en étant trop laxiste ? Un musulman peut-il tuer au nom de Dieu et invoquer dans ses prières Allah le miséricordieux ? Un chrétien peut-il partir en croisade au nom de l'amour des ennemis qu'il prêche ?

Le seul nationalisme qui trouve sa légitimité même en étant adossé à des valeurs religieuses est celui des Tibétains. Ils ne vont pas tuer les autres pour montrer leur mécontentement, mais ils vont se sacrifier eux-mêmes. Ils n'en veulent jamais à ceux qui quittent leur religion et n'essayent pas d'asservir ceux qui ne pensent pas comme eux. Il est légitime pour une seule raison, totalement indépendante de ce que chacun peut penser : il n'y a pas de contradiction entre leur philosophie religieuse, leurs revendications et leurs modes d'actions.

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