Après l'agression dont j'avais été victime de la part de l'enseignant de grec à la Communauté hellénique de Lyon, le père Nicolas Kakavelakis, je restai une dizaine de minutes sur le trottoir, à discuter avec une passante. Celle-ci fut rejointe par son mari qui arriva dans la rue en scooter. Puis j'allai au commissariat pour porter plainte, sous la qualification de violences sur témoin pour l'influencer ou par représailles.
Malgré les coups portés, je n'avais pas de blessures à faire constater. Néanmoins, la qualification retenue relevait du pénal.
Pour faciliter la compréhension du récit, je vais parfois donner des informations dans l'ordre où elles sont survenues et non dans l'ordre où j'en ai eu connaissance. Mais je justifierai parfois de ces informations plus avant dans le récit, lorsque je serai en mesure d'expliquer comment je les ai obtenues.
Faisant fi des évidences, le père Nicolas avait osé affirmer que c'était moi qui l'avais agressé. Il était allé jusqu'à déclarer que j'avais tenté de le poignarder au cœur avec un stylo. Il avait appelé les pompiers et la police, prétendant que je m'étais enfui après mon acte, puis il était allé aux urgences pour faire constater une ecchymose qu'il avait sur le ventre et dont il m'attribuait la paternité.
Lui aussi avait porté plainte pour violences aggravées. Je suppose que le motif d’aggravation devait être l'usage d'une arme par destination.
La France restait sous le choc du père Hamel, assassiné alors qu'il célébrait le 26 juillet 2016. Le procureur donna des instructions pour me poursuivre, oubliant peut-être que l'actualité a régulièrement montré que le prêtre est plus souvent l'agresseur que l'on ne voudrait le croire. L'enquête allait être d'une célérité exemplaire.
Le dimanche qui suivit les faits, le 9 octobre 2016, deux voitures de police stationnèrent devant l'église orthodoxe grecque, afin d'empêcher tout belligérant d'entrer. Furent désignées persona non grata ceux qui avaient assigné la Communauté hellénique de Lyon devant le TGI de Lyon pour demander l'annulation de décisions irrégulières. Monsieur Emmanuel Bibilis resta à proximité des forces de l'ordre afin de leur désigner ceux qui pouvaient entrer ou non. Le père Nicolas renouait ici avec une décision qu'il avait déjà tenté d'imposer par la force au mois de juin.
C'était d'autant plus surréaliste que l'unique belligérant était déjà installé dans l'église et profitait de ses mensonges pour célébrer tranquillement.
Ce jour-là, j'arrivai en retard. L'office venait de se terminer et les forces de l'ordre étaient reparties. Je sentis un malaise étrange qui s'installa lorsque j'entrai. Je vénérai les icônes comme le veut l'usage, constatai une agitation soudaine et la fin de l'office puis, après quelques minutes, je m'en repartis.
Deux équipages de police avaient eu, ce même jour, la mission de m'empêcher d'entrer dans l'église. Ces stipendiés veillaient, mais la Providence avait néanmoins permis que j'entre, sans me douter de ce qui se tramait en coulisses.
Trois jours plus tard, le 12 octobre, j'écrivis au délégué du préfet à la sécurité, afin de l'informer de ce qui se passait, afin que les forces de l'ordre ne soient pas instrumentalisées à ces usages indus.
Il prévint le commissaire principal de Lyon, ainsi que le chef de la division au commissariat du 3/6, et les invita à être prudents quant au cadre d'intervention suite à des
réquisitions faites par le père Nicolas Kakavelakis. Il ne prenait pas position pour moi, mais invitait à la pondération et à l'objectivité.
Depuis que j'ai rencontré cet homme pour la première fois, il m'a toujours donné l'impression d'une grande intégrité et d'une grande sagesse.
Le dimanche suivant, le 16 octobre, les patrouilles de police n'étaient plus cantonnées devant l'église. Elles avaient simplement la mission d'intervenir en cas d'appel d'urgence.
Bien qu'il n'y eût aucune urgence, le père Nicolas les appela dès qu'il me vit arriver.
Le vicaire du métropolite, le père Grigorios Ioannidis, célébrait à ses côtés ce jour-là. Il était venu manifester le soutien total du métropolite à son prêtre. Nous eûmes droit à l'un de ces fameux discours dont le clergé a le secret : celui qui est contre le prêtre est contre l’Église ; nous soutenons le père Nicolas dans les épreuves qu'il traverse ; il y a, assis parmi vous, quelqu'un que vous devez chasser ; vous ne devez pas laisser détruire ce que vos parents et grands-parents ont construit ; blablabla, blablabla.
La police était arrivée mais, contrairement aux attentes du père Nicolas, elle n'entra pas dans l'église. Si bien qu'à la fin de l'office, il intervint pour annoncer à tous avec grandiloquence que la police était dehors et qu'elle allait m'arrêter.
Nul ne peut fuir son heure lorsque celle-ci est arrivée. Puisque le père Nicolas annonçait que mon heure était venue, je choisis d'aller au devant de mon destin et sortis de l'église.
Je trouvai là ma cousine, Pénélope Dhimoïla, actuelle présidente de l'association Communauté hellénique de Lyon. Je cherchai des yeux la police qui m'attendait pour m'arrêter et demandai à Pénélope où elle se trouvait. Sans répondre, elle tourna les talons et s'éloigna.
La police n'était pas dupe. Elle n'avait aucune raison d'arrêter qui que ce soit. Il n'y avait aucun trouble autre que dans l'esprit du père Nicolas et elle ne pouvait manifestement rien y faire. La patrouille était repartie pour s'occuper de choses sérieuses.
Mon heure n'était donc pas encore venue...
- Vous attendez quelque chose ? - Non, c'est arrivé. - Quoi donc ? - Ton heure ! |
Je rentrai dans l'église où je discutai avec les personnes présentes, qui essayaient de comprendre ce que voulaient dire le père Nicolas et le père Grigorios dans leurs discours. Que leur répondre d'autre que ces deux là avaient été fidèles à eux-mêmes - à défaut de l'être à leurs principes affichés - et qu'il n'y avait malheureusement rien à comprendre.
Il y avait des dépôts de plainte et une enquête en cours. La position du père Nicolas était partiale, car il était mis en cause dans cette affaire. Quand au vicaire, sa position était au mieux fantaisiste, car il parlait sans s'être enquis des tenants et des aboutissants. Il avait pris une position de principe au regard de l'Institution qu'il représentait, sans même avoir pris la peine d'interroger les protagonistes.
Pour quelqu'un qui dit défendre la Vérité et affirme la représenter, l'attitude était pour le moins désinvolte.
Le 21 octobre, le délégué du préfet à la sécurité m'écrivit, dans les termes évoqués plus haut. Il s'excusait pour cette réponse
tardive et m'informait qu'il n'avait pas attendu pour intervenir.
Deux jours plus tard, dimanche 23 octobre, fut célébrée la fête nationale grecque. À cette occasion, pour la première fois, fut présent monsieur Amat, directeur de cabinet du préfet du Rhône. Il venait afficher son soutien à la communauté et vraisemblablement manifester le soutien de l’État pour l'agression dont le père Nicolas se disait victime.
Je ne pus m'empêcher d'admirer la sagesse de monsieur le préfet. Par cette double intervention, il affichait une position d'un parfait équilibre. Effectivement, l’État ne pouvait accepter qu'un prêtre soit agressé injustement. Mais l’État ne pouvait pas davantage accepter d'être instrumentalisé. Il y avait une instruction qui suivait des règles de droit. L'enquête allait déterminer les responsabilités mais, d'ici à ce qu'un juge se prononce, tous les protagonistes étaient présumés innocents.
Il n'y a que dans l'esprit embrumé du vicaire de l'évêque que le procès avait déjà eu lieu, la sentence prononcée et qu'elle devait être exécutée. Dans le monde réel, l'instruction battait son plein avec une grande rigueur et ses conclusions ne seraient pas forcément celles qui avaient été annoncées.
Bonjour, pouvez-vous traduire SVP le petit dialogue du dessin? Mes cours de grec (ancien) sont très... anciens !
RépondreSupprimerMerci !
- Vous attendez quelque chose ?
RépondreSupprimer- Non, c'est arrivé.
- Quoi donc ?
- Ton heure !