de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

jeudi 24 décembre 2015

193- 1990



Madame Tsangarakis avait engagé un recours, en 1982, afin de demander l'annulation de la donation faite par son oncle défunt à la Communauté hellénique de Lyon. Le tribunal lui avait donné raison en reconnaissant que la donation avait été établie dans des conditions totalement irrégulières. Le jugement avait été confirmé en appel en 1986. Le métropolite Jérémie était resté deux ans en refusant de rembourser les sommes que le tribunal lui intimait de rendre.
 
Le 30 octobre 1988, monseigneur Jérémie était venu à Lyon pour la commémoration de la fête nationale grecque. Il avait alors rencontré madame Tsangarakis, chez elle, pour ne pas lui rembourser cet argent. Mais c'était avant qu'il aurait dû se rappeler qu'il était un évêque, et non un administrateur de société. Ce contact n'eût pas l'effet escompté et il dut payer.

Il y a des hommes qui n'apprennent rien de leurs échecs et Jérémie en faisait partie. Il venait de subir un revers judiciaire pour avoir tenté de s'accaparer irrégulièrement les biens d'un homme mourant, mais continuait à convoiter les biens de la Communauté hellénique de Lyon.
 
Il voulut unifier les statuts de toutes les associations françaises qui dépendaient de lui et proposa que les statuts de Lyon fussent changés. C'était du moins la version officielle présentée car, dans les faits, il allait revenir aux heures sombres de L'Annonciation, en asservissant l'association au joug de l’Église.

Le père Athanase Iskos accepta la requête du métropolite et convoqua une assemblée générale extraordinaire afin de modifier les statuts.

Métropolite Jérémie Calligiorgis


L'AG eût lieu le 23 février 1990. Depuis 1921, les AG avaient toujours eu lieu le dimanche, pour permettre à un maximum de fidèles d'être présents. Celle-ci était la première à se tenir un vendredi soir, laissant planer un doute sur sa réelle légitimité.

La première modification sera de donner à l'association le qualificatif de « paroisse ». Terme que l'on retrouvera à toutes les pages. Paroisse qui s'intégrera dans l'Union directrice des Associations Cultuelles Orthodoxes Grecques pour la France.

Monseigneur Mélétios avait, dans les faits, supprimé la cotisation pour être membre de la Communauté hellénique de Lyon, lors de l'AG du 19 décembre 1954. Les nouveaux statuts allaient tenter d'en réintroduire le principe à l'article 5 : La cotisation annuelle sera fixée par le Conseil d'Administration lors de sa première réunion. Malgré cette modification, le conseil gardera l'usage antérieur, et ne fixera pas de cotisation lors de cette fameuse première réunion.

Le clergé poussa également pour mettre fin au statu-quo qui existait entre ceux qui voyaient l'association comme uniquement cultuelle et ceux qui tenaient à ne pas dissocier le cultuel et le culturel. Dans un geste d'ouverture, monseigneur Mélétios avait transformé le nom, le faisant passer d'Association Cultuelle Église Orthodoxe Grecque d'Orient - l'Annonciation de Notre-Dame à Communauté Hellénique de Lyon et des environs - association cultuelle orthodoxe « L'Annonciation ». Le nom fut raccourci en 1990 pour devenir Association cultuelle orthodoxe grecque.

Cependant, l'en-tête des documents de l'association était resté le même, et la déclaration adressée au préfet ne faisait pas mention du changement de nom. Si bien que la préfecture délivra le récépissé sans tenir compte de cette modification, qui resta lettre morte.

Les paroissiens sont membres de droit, ce qui, là encore, est une évolution restrictive. Monseigneur Mélétios, lui, en son temps, avait voulu que toute personne, grecque ou d'origine, présente à l'AG, puisse se revendiquer de l'association et voter, sans qu'il ait à justifier de son appartenance à l'église orthodoxe, faisant annuler toute clause des statuts qui pouvait empêcher de revendiquer cette appartenance légitime à l'association.

Un article est également ajouté, dans les nouveaux statuts, afin de fixer les conditions de la perte des droits de membres. L'une des clauses prévues est l'opposition au pouvoir canonique du Métropolite. Celui-ci obtient le droit de pourvoir aux postes vacants du conseil d'administration.

Il faudrait désormais être paroissien pour être membre de l'association, et être à jour de ses obligations annuelles de communion et de confession (art. 4 § C). D'où de telles obligations pouvaient-elles bien venir ?

Il faut se plonger dans le code de droit canonique de l’Église catholique et les archives du Vatican pour lire, au canon 920, que tout fidèle, après avoir été initié à la très sainte Eucharistie, est tenu par l'obligation de recevoir la sainte communion au moins une fois l'an.

Les règles de l’Église orthodoxe en la matière se résument, quant à elles, au canon 80 du 6ème concile œcuménique, dit de Constantinople II, en 553, qui décrète que, sans raison grave, on ne peut rester plus de trois semaines loin de l'église, sous peine d'être déposé si le négligent est prêtre, ou privé de communion s'il est laïc.

De même, pour la confession, ce sont les textes du Vatican qui fixent que tous les fidèles qui ont atteint l'âge de discernement sont tenus fidèlement de confesser leurs péchés mortels au moins une fois par an. Ou encore ici : L'âge de discernement, tant pour la confession que pour la communion, est l'âge où l'enfant commence à raisonner, à savoir autour de la septième année, soit avant ou après. À partir de ce moment commence l'obligation de satisfaire à la fois au précepte de la confession et de la communion.

Par une décision mal inspirée, monseigneur Jérémie faisait donc inclure une clause à nos statuts disant que l'on ne pourrait pas être membre de la paroisse orthodoxe si l'on ne respectait pas le canon 920 du code de droit canonique du Vatican, et autres textes papaux, faisant fi des règles de sa propre Église.

J'imagine bien Nicolas Angeloudis voter cette clause sans se poser la moindre question....


La liste des revenus possibles de l'association ne change pas. Mais il faut dire qu'ils sont fixés par l'article 19 de la loi de 1905, qui ne tolère pas d'exception à cette liste, sous peine de perdre le statut cultuel de l'association.

Depuis 1929, l'AG ne pouvait se tenir valablement sans la moitié des membres plus un. Il ne faut désormais plus que le quart des membres pour statuer.

Le nombre de membres du conseil était passé de 15 à 19 lors de l'AG du 16 décembre 1973. Le conseil sera réduit pour revenir à 15 en 1990.

Les statuts de 1954 prévoyaient que les comptes de l'association seraient présentés tous les ans, mais uniquement au métropolite. Ceux de 1990 tenteront de fixer à trois ans le délai entre lesquels les comptes sont présentés à l'AG. Mais la préfecture refusa ce point (ou peut-être ne fit-elle que souligner le problème qu'il posait), car l'article 19 de la loi de 1905 prévoit que, peu importe ce que disent les statuts, les comptes sont présentés tous les ans devant l'AG. Ne pas le respecter rendait impossible la reconnaissance cultuelle de l'association.

Le « trois » fut effacé avec du blanc par l'un des membres du conseil. Les statuts furent acceptés sous cette forme, si bien que l'AG devait désormais se réunir tous les ans, comme durant les 15 premières années de la vie de l'Union Philanthropique et de L'Annonciation.

Depuis 1929, les statuts décrivaient le graphisme du sceau de l'association : son nom inscrit dans un cercle, la date de création au bas du cercle et, au centre, le dessin de l'Annonciation. Mais les statuts précisaient que ce sceau ne pouvait pas être utilisé en France. Les statuts de 1990 abolirent cette clause, mais l'usage de ne pas l'utiliser sur les documents officiels perdura, car la loi sur la laïcité, elle, n'avait pas changé.


Cette nouvelle version des statuts se voulait plus rigoureuse au niveau du droit. Elle restait dans l'esprit très proche des différents statuts qui avaient prévalu de 1929 à 1954. Mais il manquait cette bienveillance paternelle que les fondateurs de l'Union Philanthropique avaient voulu faire exister, et que monseigneur Mélétios avait su réinsuffler le 19 décembre 1954. En ceci, nous assistions là à une régression.

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