Les étudiants en théologie, pas forcément les plus sérieux, disent que les derniers mots de Jeanne d'Arc ont été : Descendre, je veux descendre ! Le bourreau lui a alors répondu : T'inquiète pas, t'en auras des cendres ! Cela pose évidemment la question du sens du sacrifice face à un appel à servir Dieu : pour qui, pourquoi, comment, quand, à quel prix ?
Peu de temps après avoir commencé les travaux de la réfection du presbytère, le père Nicolas Kakavelakis m'a demandé de m'occuper du catéchisme pour les adultes. L'idée ne me plaisait pas trop car je préfère écrire que parler, et plus encore écouter. Cet exercice m'était totalement étranger et je ne savais pas comment j'allais pouvoir l'aborder. J'ai quand même accepté, le voyant comme une sorte de défi, et je me suis lancé. Je ne voulais pas partir sur l'analyse de textes que, de toute façon, je ne maîtrise pas correctement, mais plutôt prendre des situations de la vie et voir ce que l'on pouvait en dire au regard des responsabilités que l'on a, de la Tradition et de l’Évangile.
Je n'étais pas à l'aise lors du premier cours, mais j'ai pris de l'assurance et me suis occupé de cette activité durant quelques mois, les samedi soirs.
Le père Nicolas a eu des retours positifs, ce qui l'a incité à me demander d'animer la venue de classes de collège. Lorsque les élèves étudient les différentes religions, ils vont parfois visiter des lieux de culte avec leurs enseignants. Il y a donc régulièrement des classes qui viennent visiter l'église grecque durant l'année scolaire. Cela me semblait beaucoup plus facile que pour des adultes parce que les mots devaient rester simples, qu'il y a énormément à dire quand on présente une église au regard de sa tradition, et que c'est toujours le même discours qui sert de base d'une visite à l'autre en ayant la possibilité de prendre du recul pour l'affiner.
Il y avait également des questions d'élèves ou d'enseignants qui permettaient de relancer la discussion. Ça aide pour qu'il n'y ait pas de blanc, garder une dynamique et de l'intérêt. Le père Nicolas était là et il intervenait pour compléter ce que je disais, ou répondre à des questions spécifiques. Ce n'est pas tant le contenu que les professeurs ont retenu, mais le fait que les élèves n'avaient pas été dissipés pendant les explications, ce qui semblait les surprendre.
Un jour, après l'une de ces visites, le père Nicolas m'a invité à m'asseoir pour discuter. Il m'a alors dit qu'il y avait quelque chose quand je parlais et qu'il voulait me présenter à l'évêque pour que je devienne prêtre. C'était assorti d'un petit discours traditionnel : Tu sais où est ton cœur, vois-le comme un appel, blabla, blabla....
Ce que l'on ressent dans un moment comme celui-ci est un mélange de plusieurs choses différentes, allant de qu'est-ce que je vais aller foutre dans cette galère à de la satisfaction mêlée à une forme de reconnaissance. Je ne peux pas dire qu'une impression particulière se détachait à ce moment-là. J'ai évité de répondre en disant simplement : Ça veut dire que je vais devoir me marier
Le père Nicolas a alors réalisé que je ne l'étais pas et que c'était une cause d'empêchement canonique qui venait ruiner sa proposition. Il devait me marier d'urgence avant la fin de l'année. Cela me laissait un peu de répit pour savoir ce que je voulais pour moi-même. Que pouvait en penser ma possible future femme ? Mis à part le fait que j'étais un crétin si je lui demandais de l'épouser pour remplir les bonnes cases de critères à respecter ! Sauf si l'on est sûr de son choix, ce qui n'était pas mon cas, il y a de très nombreuses questions qui se posent dans un moment comme celui-là et il convient de les appréhender avec lucidité.
J'ai donc remis ces questions à plus tard et j'ai continué mon travail au presbytère.
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